Éric Lapointe : À fleur de peau
L’enfant martyr du showbiz québécois repart en pèlerinage sur les routes avec un nouveau lot de confessions. À l’approche du millionième album vendu, il réitère sa position.
Pas évident pour le journaliste de saisir le gars au tattoo de serpent qui se triture les plaies sur scène et vomit de peur lorsqu’il n’y est plus… "Je ne suis pas un poète, j’écris au premier degré", plaidera Éric Lapointe pour unique défense auprès de ses détracteurs. Plaire aux ratés sympathiques, c’est bien son dernier souci. Pourtant, son succès populaire l’a depuis longtemps fait passer au statut de légende. Ses pairs se bousculent à sa porte, il n’y a qu’à voir la brochette de collaborateurs présents sur Ma peau, son cinquième album: Luc Plamondon, Roger Tabra, Michel Rivard, Dennis DeYoung, Daniel Lavoie, Louise Forestier, etc. L’Assemblée nationale a même unanimement salué sa carrière et sa millionième galette: "Ah, c’est-tu cute ça! (rires) J’étais surtout content pour ma mère qui était avec moé, pis qui était fière de son gars. Avant de devenir populaire, j’y avais pas donné grand chance d’être fière. Y en a au Parlement qui s’intéressent encore à la culture", explique-t-il, passant de l’ironie à la plus sincère confession d’un seul trait.
Ce millionième sera aussi le théâtre de célébrations rassemblant les collaborateurs de toutes les époques, les fans, tellement fidèles, et les amis. Les détails restent à venir, mais on peut d’ores et déjà s’attendre à ce que Lapointe réalise un vieux rêve, un show de rock symphonique, dont il parle avec une fébrilité palpable. On constate d’ailleurs l’omniprésence d’une section de cordes sur Ma peau: "J’ai toujours vraiment tripé sur les sections de cordes, spécialement quand elles ont les cheveux longs et qu’elles sont jolies. C’est juste dommage qu’on soit obligés de les remplacer par des claviers parce qu’elles sont syndiquées. (rires) Des fois je demande des ensembles de cordes, pis quand j’écoute ça je me demande: "Crisse, m’as-tu mettre ma voix là-dessus? M’as toute scraper!"" Comme quoi les ventes n’altèrent en rien sa légendaire insécurité.
Peau sensible
Ma peau, c’est du Éric Lapointe, ni plus, ni moins. Qu’on aime ou qu’on aime moins, on ne peut rester de glace devant la force de l’interprétation. Passant des violons-piano aux traditionnels solos de guitare tout droit tirés des années heavy métal, Éric chante les mots de Tabra, Plamondon et Lapointe avec une intensité à faire taire (ou fuir) l’incrédule. Car la vérité de son jeu prend le dessus et impose le respect. Sa version de L’amour existe encore inspire une vive émotion: "Je pense que c’est la plus belle chanson que Luc a jamais écrite parce que cette chanson-là n’a besoin de rien. Tu peux la fausser pis elle est belle pareil. Quand je me suis mis à la chanter, j’ai pensé tout de suite que c’était l’histoire d’un gars, pis d’une certaine façon mon histoire aussi." Comme le souligne le principal intéressé: "toutes mes années de déroute" sonnent nécessairement plus juste ici que chez Céline.
Plus masochiste que suicidaire, Lapointe saigne depuis 1994 sur toutes les scènes du Québec: "J’avais sous-estimé l’endurance du corps humain, je n’aurais jamais pensé passer 30 ans pis là chu en train d’passer 40. On va continuer sur cette ride-là, j’ai du fun." Trentenaire poqué, sa peau est tuméfiée, brûlée par sa faute, pyromane impénitent. "Un coup que l’album est lancé, que t’as exorcisé tes démons, t’as fait ta thérapie pis tu le donnes au monde, tu pitches tes angoisses pis tes remises en question dans leur cour. Ça t’appartient plus, c’est à eux autres."
Savourez un shooter de Lapointe avec Les Porn Flakes le 13 juin prochain dans le cadre du Festival franco-ontarien, l’instant de quatre chansons: "Ça c’est juste agace. Je l’fais pour le trip de gang, mais c’est comme [un coït interrompu, NDLR]. Mets pas ça textuellement, OK?… Quand j’monte sur un stage, j’veux être là pour deux heures et demie." Lapointe promènera sa gang partout cet été, une occasion de découvrir les pièces de Ma peau: «C’est l’fun d’avoir des nouvelles tounes à proposer pis d’avoir peur, de pas savoir. Tu sais que la moitié du public en est à la première écoute. C’est sain de retrouver le trac, de retrouver les angoisses. C’est ça qui est l’fun de ce métier-là, d’avoir peur, de sauter en parachute à tous les soirs.»
Le 13 juin dès 21h15
À la Plaza des festivals
Voir calendrier Rock/Pop
Le 12 septembre à 20h
À la salle Odyssée
À écouter si vous aimez / Hugo Lapointe, Johnny Hallyday, Bon Jovi
Les Porn Flakes: côté givré et… côté givré!
Les Porn Flakes ont le mandat de faire "pogner le party" du Festival franco-ontarien en soulignant le 400e anniversaire de la ville de Québec. Entrevue "givrée" avec Dan Georgesco, guitariste du groupe.
Les Porn Flakes, c’est d’abord une gang de chums qui jouent du rock et qui invitent des amis à chanter avec eux. Au fil des ans, leurs "rock’n’roll orgies" se sont transformées en véritables happenings réunissant la crème du showbiz québécois dans une atmosphère pour le moins délinquante. Disons simplement que Dan Georgesco, Mike Plant (guitare), Alain Quirion (batterie) et, plus récemment, Pat Lavergne (basse) auraient pu écrire le film Spinal Tap tellement ils ont eux-mêmes vécu des histoires de vieux routiers. Des preuves? "Une shot, notre drummer a fini à l’hôpital. Il a souffert de déshydratation. On a joué tout l’après-midi, cinq heures de temps, pis lui il joue comme un défoncé. Pendant le spectacle, il faisait super chaud et il s’était mal hydraté alors il a fini en ambulance et c’est Ariane Moffatt qui l’a remplacé aux drums. Ah ouais, the show must go on, hein?" confie Georgesco mi-éprouvé, mi-hilare.
Mais Les Porn Flakes ont aussi un côté tendre: "Y a eu des osties de moments. Comme Boule Noire, pas longtemps avant qu’il décède. Plein d’artistes étaient là, on a fait une de ses tounes ensemble, pis il est venu chanter avec nous autres. Ça lui avait fait un buzz ce soir-là." Pour connaître la liste des gens qui sont venus faire le party avec les Porn depuis 2000, ouvrez le bottin de l’Union des artistes! Seront avec eux, ce 13 juin au Festival franco-ontarien, Damien Robitaille, Éric Lapointe, Marie-Chantal Toupin, Plastic Bertrand, Kevin Parent, Mighty Popo, Jean-François Breau et Marie-Ève Janvier. "C’est un show spécial parce qu’il est quasiment francophone à 100 %. On est plutôt habitués de faire des covers en anglais. Il y a Plastic Bertrand qui descend d’Europe pour faire ça, on est bien contents de le revoir parce qu’on a joué avec il y a deux ans et ça avait été bien cool", anticipe Dan avec hâte.
Une soirée avec les Porn, on ne sait jamais comment ça peut finir. Imaginez Michèle Richard chantant du Ozzy, Michel Louvain s’époumonant sur des riffs à la Led Zep, Éric Lapointe ou Kevin Parent chantant Suspicious Minds ou Paint It Black et vous aurez une petite idée de l’ambiance très rock’n’roll qui régnera sur le parterre de l’hôtel de ville d’Ottawa cette fin de semaine. Pour connaître les détails de la programmation du Festival franco-ontarien: www.ffo.ca
À écouter si vous aimez / AC/DC, Led Zeppelin, Elvis