Melody Gardot : Fragile Melody
Musique

Melody Gardot : Fragile Melody

Melody Gardot s’appuie sur une canne et les verres fumés qui cachent son regard ne sont guère l’effet d’une futile coquetterie. La jazzwoman vit la chanson comme une thérapie.

De tous les nouveaux disques de blues ou de jazz, le premier album de Melody Gardot, Worrysome Heart, est celui qui se vend le mieux au Québec depuis plusieurs semaines. Et ce n’est qu’un début! Avec ses trois soirs d’affilée au TNM, cette Américaine de 23 ans au destin si particulier pourrait bien s’imposer comme la révélation du FIJM cette année. "J’ai joué du piano dans les bars entre 16 et 19 ans, mais je ne me sentais pas impliquée dans la musique comme aujourd’hui. Je ne voulais pas faire carrière. La découverte tardive de ma voix a vraiment été une surprise!"

Immobilisée sur un lit d’hôpital à la suite d’un cruel accident (une jeep brûle un feu rouge et vient percuter son vélo), Melody a le corps et les rêves brisés. Puis elle se met à la guitare lorsque sa mère insiste qu’elle peut en jouer couchée. Quatre ans plus tard, son premier disque autobiographique, écrit en rééducation, se retrouve sous étiquette Verve. Et la dame affiche sur son site le plus beau planning dont une chanteuse de jazz puisse rêver en 2008. "Honnêtement, je ne connaissais même pas l’existence de tous ces festivals! Montreux, Montréal, oui. Mais pour le reste, je ne suis pas vraiment ce qu’on appelle une jazzhead. Je vais essayer de dormir entre les shows pour bien boucler la tournée."

Car Melody est fragile. Autre séquelle de l’accident, l’hypersensibilité au son oblige à aménager la scène de manière à ce que la chanteuse entende la balance du groupe sans ces "moniteurs" à l’oreille qui sont dorénavant le standard de l’industrie. Pourtant, malgré ses airs de ténébreuse diva, cette miraculée n’a rien d’une pasionaria ni d’une accablée. S’exprimant d’une voix douce, elle rit facilement et nous invite sans fausse gêne dans son intimité. Le miracle, c’est bien que, même si l’auteure confesse sans ambages son besoin d’amour, commente sa propre expérience et la fêlure des choses humaines, jamais elle n’emprunte un ton misérabiliste. Gardot avoue s’être dit comme ça: "Bon, je vais donc mettre en musique mon journal intime…" Mais contrairement à ce qu’on pourrait croire, elle transforme sa mélancolie en un art sobre et digne.

Les 30 juin, 2 et 3 juillet
Au TNM

À écouter si vous aimez /
Norah Jones, Rickie Lee Jones, Joni Mitchell