Jake and the Leprechauns : Âme américaine
Le groupe sherbrookois Jake and the Leprechauns remonte sur scène après une année de labeur sur son second album qui s’annonce d’ores et déjà comme un incontournable.
À la toute fin du premier disque de Jake and the Leprechauns (sorti en 2006), tous les membres du groupe répètent calmement, mais inlassablement "I am a stranger to the ocean" sur un air de guitare propice au vague à l’âme. En introduction du deuxième album, qui devrait paraître cet automne, on retrouve le même choeur, mais cette fois, il scande haut et fort: "Maybe we should buy the house on the beach/Maybe we should move to Greece". La fragilité des débuts a cédé toute la place à une conviction qui s’entend également dans la musique. Guitare pedal steel, flûte traversière et violon s’ajoutent progressivement dans cette pièce qui se conclut par un solo de guitare électrique digne de Neil Young et ses Crazy Horses. La table est mise. S’il y a une justice en ce bas monde musical, le disque A long dash (followed by ten seconds of silence) devrait positionner cette formation sherbrookoise parmi la scène folk-rock canadienne.
Charles-Antoine Gosselin et Philippe Custeau forment le noyau créateur du groupe; ils s’occupent des compositions et des arrangements. Lors des spectacles, Marc-André Gosselin, Maxime Rouleau, Sylvain Lussier et Simon Bergeron les accompagnent.
"La dynamique du groupe a passablement changé depuis le premier album, précise Philippe. Tous les musiciens ont eu une influence sur le développement des arrangements." Les liens sont plus solides que jamais; la confiance est de la partie. "On sent qu’on tient la formule. Les musiciens qu’on a en ce moment sont là pour rester. S’il y a quelque chose à arriver, on est vraiment prêts, autant dans la forme que dans le fond", ajoute Charles-Antoine.
FAIRE SA CHANCE
Désormais entouré des bonnes personnes, Jake and the Leprechauns s’est donné le temps de réaliser un second album à la hauteur de ses ambitions. Des leçons furent tirées du premier enregistrement, et le groupe a su en tirer profit.
"On est encore un band à la recherche d’un son, avoue tout de même Charles-Antoine. Il se définit de plus en plus, mais je ne suis pas encore convaincu que ce soit coulé dans le ciment. Moi et Philippe, on cherche toujours à aller plus loin. On n’a pas de problème avec l’idée de faire des albums très différents l’un de l’autre. J’ai le feeling que le deuxième album, c’est un peu ce qu’on aurait voulu que le premier soit."
"Il n’y a pas eu de décision consciente de dire "On veut sonner comme ça", explique Philippe. Cet album-là, c’est vraiment ce qu’on entendait pour chacune des pièces, sans se limiter. On a donné tout ce qu’on avait." Charles-Antoine renchérit: "Il n’y a pas eu de compromis, et on a vraiment été chanceux au niveau des collaborations."
La chance n’y est sûrement pas pour grand-chose, car le groupe bénéficie d’une bonne réputation dans le milieu en plus d’avoir un impressionnant réseau de contacts. Voilà qui explique un peu pourquoi on retrouve Bob Egan, de Blue Rodeo, (qui fut également membre du groupe Wilco) à la guitare pedal steel, ainsi qu’Andy Creeggan, des Barenaked Ladies, au piano. Arlan Thompson, de Wolf Parade, s’est occupé de l’enregistrement de la batterie et la basse. Quant au délicat mixage, il fut confié à Mark Lawsom qui est l’ingénieur de son d’Arcade Fire.
VILLE/CAMPAGNE
"En évoluant dans l’enregistrement, j’ai réalisé qu’un des thèmes principaux était le contraste entre la ville et la campagne", raconte Philippe qui écrit tous les textes du groupe. Le titre de l’album y fait d’ailleurs référence: a long dash pour la frénésie urbaine et ten seconds of silence pour la tranquillité rurale.
Certaines des chansons évoquent également l’Amérique, celle du sud des États-Unis. Le point de vue de Philippe Custeau en est un de l’intérieur puisqu’il a effectué une maîtrise en création littéraire à l’Université de La Nouvelle-Orléans. "J’y ai vécu assez longtemps. Ça m’habite autant musicalement que d’un point de vue littéraire. Il y avait tellement de villes, de situations mythiques, d’écrivains légendaires… Tu allais à quelque part, et il y avait tout le temps quelque chose: Hemingway a resté là, Coltrane a déjà joué ici… Tout ça me fascinait." Voilà des références qui évoquent des images qu’il a su brillamment mettre en mots.
LA FIN DE L’ISOLEMENT
Chaque fois que Philippe termine un texte, il l’envoie à son acolyte qui trace ensuite les grandes lignes musicales des chansons. En plus d’être chanteur, Charles-Antoine Gosselin se révèle comme un compositeur de talent pour qui le style folk-rock n’a plus de secret… ou presque. Il avoue que les derniers temps furent déterminants pour lui: "Une erreur que j’ai faite fut d’essayer de limiter mes influences en pensant que ce que je composais allait venir de moi. J’ai réalisé avec le temps que tout ce que tu fais provient de tes influences. Je me suis tiré dans le pied et de plus en plus, je m’ouvre à ce qui se fait. On n’invente rien."
S’il est difficile d’innover dans un genre musical qui fait école, il faut admettre que les membres de Jake and the Leprechauns ont ce qu’il faut pour faire partie des premiers de classe.
Le 5 septembre à 19 h 30
Avec La Patère Rose et The Blue Seeds
À la Place des Moulins
Dans le cadre des concerts de la cité
Le 6 septembre à 12 h et 20 h
À la pointe Merry
Dans le cadre de la Fête des vendanges
À écouter si vous aimez /
Bright Eyes, Blue Rodeo, Wilco