Coeur de Pirate : À l'abordage
Musique

Coeur de Pirate : À l’abordage

Ascension rapide d’une jeune pianiste charismatique, l’histoire de Coeur de Pirate racontée.

Tel un vrai flibustier, Béatrice Martin a abordé le bateau de la pop québécoise sans crier gare. Mais plutôt que de le piller, l’auteure-compositrice-interprète derrière Coeur de Pirate y a apporté un coffre débordant de petits bijoux de chansons jouées au piano. Rien de tape-à-l’oeil, que des perles d’environ deux minutes trente, toutes fragiles, toutes franches. Vite fait, de nombreux marins haut gradés ont accueilli Béatrice à bras ouvert, causant une certaine jalousie chez d’autres matelots n’y voyant qu’une jeune sirène opportuniste, blonde de surcroît.

Sous contrat avec l’étiquette Grosse Boîte/Dare To Care (Tricot Machine, Malajube) et invitée à se produire, cet été, aux FrancoFolies de Montréal et au festival Osheaga, la musicienne n’aurait jamais cru attirer autant d’attention en si peu de temps. Dire qu’il y a un an seulement, elle était la simple claviériste de Bonjour Brumaire. "J’ai mis quatre pièces sur ma page MySpace, donné deux concerts, et hop!, blogueurs, journalistes et représentants des maisons de disques se sont précipités sur mon cas", nous expliquait Béatrice au printemps. "Je ne comprends pas trop ce qui m’arrive. J’ai seulement 18 ans, et ça me dépasse un peu."

Avec le lancement de son premier album éponyme la semaine prochaine, celle qui fêtera ses 19 ans le 22 septembre vit maintenant une rentrée scolaire hors du commun, la plus idyllique de son existence. La journée de notre entretien, elle faisait l’objet d’une séance photos en avant-midi. Suivait en après-midi un cours au cégep Jean-de-Brébeuf, où elle termine un DEC en Arts, lettres et communications. Puis, elle accordait deux entrevues en fin de journée. De quoi faire décrocher n’importe quel jeune blasé par sa vie d’étudiant. "Non, non. J’ai bien l’intention de m’inscrire à l’université", me contredit la jeune femme.

Faut dire que Béatrice Martin a l’habitude des bancs d’école, elle qui a étudié le piano classique au Conservatoire de 9 à 14 ans. "Au lieu d’entretenir une vie sociale, je pratiquais mon doigté tous les jours. J’étais ultra-renfermée. Je ne parlais à personne et je gardais tout en dedans."

Difficile de la croire sur parole. Suffit de lui parler cinq minutes pour réaliser à quel point l’artiste a du bagout, s’exprimant franchement sur ses émotions comme lorsqu’elle m’a annoncé son départ de Bonjour Brumaire après un concert de la formation en avril dernier. "Tu viens de voir mon dernier spectacle avec le groupe, m’avait-elle lancé. Je ne m’entends plus avec eux. Tu peux l’écrire dans ton journal." Et vlan!, le trait était tiré.

"Même si j’ai quitté Bonjour Brumaire dans un contexte difficile, mon passage au sein de la troupe m’a grandement aidée à socialiser, réfléchit aujourd’hui la chanteuse. Lorsque des fans venaient me parler après les concerts, j’avais pas le choix de leur répondre. Ça m’a donné confiance."

Ainsi disposée, Béatrice s’est servie des compositions de Coeur de Pirate pour écouler le fiel accumulé pendant son adolescence. Épaulée par le réalisateur David Brunet (Tricot Machine, Yann Perreau), qui enrobe l’album d’arrangements de cordes, de cuivres et d’orgues, la pianiste y immortalise plusieurs chagrins d’amour déchirants. "C’est pour ça que mes chansons sont courtes. Autrement, le disque aurait été assommant", rigole la Montréalaise qui vient d’écrire une pièce pour le prochain disque de Stéphanie Lapointe. "Sérieusement, un coeur de pirate, c’est un coeur qui même après avoir été piétiné à maintes reprises peut encore aimer avec autant d’ardeur et de confiance. C’est un coeur qu’on a pillé, mais qui s’est relevé. Parallèlement, un coeur de pirate c’est aussi une facette inhérente de l’âme humaine. C’est triste à dire, mais un pirate, c’est infidèle, et ça ne doit rien à personne." Nous voilà prévenus.

Coeur de Pirate
Coeur de Pirate
(Grosse Boîte/Outside)
En magasin le 16 septembre

À écouter si vous aimez /
Pierre Lapointe, Fiona Apple, Stéphanie Lapointe