Ratatat : Ratatouille pour oreilles
Le duo Ratatat a fait de son répertoire électro atmosphérique un plat de haute gastronomie sonore. Entrevue avec le chef.
Au pays des remixes et des duos électro instrumentaux, les Français de Justice règnent comme McDo domine l’industrie de la bouffe rapide. Leurs tournées planétaires sont réglées au quart de tour (de livres), et les DJ se cachent derrière leurs machines et leur faux mur d’amplis pour servir une distorsion aussi copieuse que la sauce rosée du BigMac. Fort efficace, le résultat n’en demeure pas moins faible en protéines. Tout le contraire du duo new-yorkais Ratatat, de la haute gastronomie pour oreilles aussi cautionnée par Daft Punk, avec qui la troupe a partagé la scène. L’appui s’ajoute d’ailleurs à celui de l’Islandaise Björk qui a prêté sa maison aux Américains lors de l’enregistrement de leur deuxième gravé, Classics (2006).
Moins club et tape-à-l’oeil que Justice, mais tout aussi groovy, Ratatat joue de finesse depuis sa fondation en 2001. Si bien qu’on n’assiste pas aux prestations du groupe pour danser, mais pour s’immerger dans un univers mélodique empruntant autant au jazz, au funk, au rock et au hip-hop qu’aux musiques indiennes. Menée par le guitariste Mike Stroud et le mixeur/producteur Evan Mast, la formation évolue de remix en remix et d’album en album. Troisième en carrière, LP3 a été bouclé en 40 jours et 40 nuits avant d’être lancé en juillet dernier. "Depuis nos débuts, nous produisions nos albums avec une guitare, une basse, un clavier et un ordinateur, explique Evan Mast. Cette fois, nous nous sommes retrouvés au Old Soul Studio, où les possibilités étaient multiples. Nous avions soudainement accès à des orgues, des pianos électroniques, des claviers et même un clavecin que nous avons abondamment utilisé. Une nouvelle palette sonore s’ouvrait à nous, et c’est ce qui explique le côté plus atmosphérique de LP3."
Fins mélodistes, les hommes de Ratatat manient tout aussi bien les structures de chanson complexes, où s’additionnent les pistes instrumentales trafiquées d’effets (boucles jouées à la renverse, échos, distorsions). Evan s’est récemment amusé à produire quelques clips à partir des pièces de LP3, s’assurant de traduire chaque effet sonore en images. Réalisé à partir d’extraits explosifs du film Predator, le court métrage accompagnant la pièce Mirando peut être visionné sur le site officiel du groupe. "Mike avait amené Predator en studio, et nous l’avons écouté un soir en mangeant. J’ai été renversé par toute l’absurdité du film. J’ai donc voulu rassembler les séquences violentes et les mettre bout à bout, un peu comme ce type qui a fait un montage avec tous les passages explicites entendus sur un disque de NWA."
En spectacle, Ratatat a aussi évolué depuis son dernier passage aux Saints il y a deux ans. "Nous sommes maintenant trois sur scène. Un ami joue du clavier, alors que Mike et moi utilisons encore nos guitares et basses, mais aussi de nouveaux instruments comme d’autres claviers et des percussions. Nouveau disque oblige, nous devions peaufiner notre formule concert."
Rien à voir avec l’immobilisme des deux justiciers français.
À écouter si vous aimez /
Daft Punk, Manitoba, !!!