NOFX : Cette machine qui tue les fascistes
Musique

NOFX : Cette machine qui tue les fascistes

NOFX a une guerre à terminer avec un certain Georges W.

"Ça s’annonce bien! Je crois qu’Obama va gagner." La conversation est à peine entamée que Mike Burkett nous plonge dans la réalité politique américaine, à l’aube d’une nouvelle élection après la mise en candidature de Barrack Obama.

Le chanteur et bassiste, plus connu sous le nom de Fat Mike, a fondé le groupe NOFX en 1983 ainsi que la compagnie de disques Fat Wreck Chords en 1990. Et il est toujours aussi attentif aux développements politiques de son pays, surtout au jour où le président George W. Bush quittera ses fonctions. Le musicien punk rock en fait un cas de conscience et a poussé les limites de la liberté d’expression lors de ses précédents opus discographiques afin de mettre en valeur ses opinions. Avec l’album War on Errorism (2003) et deux compilations intitulées Rock Against Bush, une croisade était en cours.

Mais une autre initiative devait s’ajouter à cette entreprise avec la tenue des dernières élections présidentielles en 2004. Avec la guerre en Irak qui faisait rage et le Patriot Act qui était en vigueur, il n’en fallait pas plus pour motiver le chanteur à mettre sur pied punkvoter.com, un forum Internet incitant les jeunes de 18 à 25 ans à s’inscrire pour les sensibiliser à l’exercice démocratique. Fat Mike avait trouvé une façon bien à lui de justifier ce geste: les jeunes qui sont en dessous de la limite d’âge permise pour boire de l’alcool sont envoyés sur le front irakien. Mais surtout, les jeunes inclus dans cette limite d’âge ne votent presque plus, alors qu’une statistique avait démontré en 2000 que seulement 38 % d’entre eux s’étaient exprimés lors de la précédente élection.

Cette action Internet a porté fruit. Une évaluation situe entre 100 000 et 200 000 le nombre d’inscriptions individuelles, et Mike Burkett en est fier. "Je me rappelle la soirée des résultats… Quand on y pense, c’est comme un jeu. Tu gagnes ou tu perds… J’ai perdu sur le résultat et Bush est resté, mais c’est une action qui valait le coup. Si tu considères le nombre de personnes qui, entre 18 et 25 ans, se sont inscrites sur le site pour voter, c’est très positif! Ces jeunes-là, ils représentent un groupe très important de la population américaine. Je suis persuadé qu’ils se souviendront de cette expérience et qu’ils se donneront la peine d’aller voter lors de la prochaine élection."

MOORE VERSUS CHOMSKY

Tel un Frank Zappa (et le Grand Wazoo), qui a fait de l’engagement politique une action concrète et irrévérencieuse, Fat Mike cultive à sa manière une idéologie libérale qui dénonce toutes les formes de répression avec désinvolture et sans faire de morale. Avec ses deux groupes, NOFX et Me First and the Gimme Gimmes, l’artiste endosse un agenda chargé où le punk rock sert de véhicule à un discours engagé.

"Nous sommes trash et gratuits dans notre manière d’être, mais on doit faire un show, affirme-t-il. Les gens ne sont pas en face de nous pour entendre un discours, c’est un show qu’ils viennent voir. On est là pour déconner, mais si tu prends la peine de t’attarder sur les paroles des chansons, tu vas constater les valeurs sociales que nous défendons. Mais, ça reste de l’entertainment! On n’a pas le choix de s’y conformer, c’est le travail que nous avons choisi. À mon avis, il y a deux façons de défendre ses convictions et de dénoncer la connerie: c’est Chomsky ou Moore. Il y a ceux qui revendiquent la méthode Noam Chomsky et qui intellectualisent le tout, et il y a la méthode Michael Moore et ceux qui utilisent le divertissement pour défendre les mêmes idées afin de dénoncer l’hypocrisie. C’est une autre façon pour toucher un autre public. Ça n’enlève rien au fait que nous le faisons parce que nous y croyons. On se fait un peu moins chier, c’est tout."

Attentif à la société qui l’entoure tout en revendiquant son attitude punk, l’artiste qui réside à San Francisco sonde à sa manière le climat social. Incisif et spontané dans ses réflexions, même si le constat est négatif, il semble surfer sur cette réalité en gardant en poche une défense que son personnage peut lui permettre d’exprimer à tout moment: "Go fuck yourself!"

"Avec tout ce qui s’est passé depuis que ce retardé est en place, réfléchit-il, j’ai l’impression que l’unité du pays en a pris un sale coup. Man! Il n’y a jamais eu autant d’armes à feu en circulation! Je n’y comprends rien. J’ai l’impression parfois qu’on se dirige tout droit vers la guerre civile. Attention, pas une guerre civile Nord-Sud. Quand je dis guerre civile, je pense à l’Afrique du Sud et à la pauvreté. Il y a un écart de richesse effrayant dans notre pays, comment veux-tu que ça ne saute pas à un moment ou un autre?" Un scénario qu’il voudrait reléguer aux oubliettes, mais pour l’instant, la croisade n’est pas finie.

À écouter si vous aimez /
Me First and the Gimme Gimmes, The Sainte Catherines, Against Me