Martin Léon : V’là l’bon vent
Martin Léon entame une année de spectacles après trois ans d’absence scénique. Dialogue aux accents poétiques avec un chic type.
Dès la sortie de Kiki BBQ en 2003, et même depuis Ann Victor au tournant du siècle, Martin Léon a su capter l’attention des critiques et, surtout, d’un public sensible à sa poésie du quotidien. Pour écrire Le Facteur vent, celui qui a joué dans la cour des Morricone, des Vigneault, des Cohen s’est retiré en campagne, quittant Montréal et ses ego surdimensionnés. Cette période de repli se fait sentir dans les arrangements, l’ambiance et la poésie de Léon. "J’ai besoin de la campagne pour ramasser mes oeufs et de la ville pour les vendre. J’aime les deux, mais la campagne me détend davantage à cause de son silence, c’est normal", confie le poète.
Bavarder avec Martin Léon, c’est prendre le pari, le parti de la poésie. Il ne la quitte pas, elle l’habite, comme la flamme dans Le Phalène, dernier titre du dernier album. Au-delà des images qu’il projette, cinéphile reconnu, un amour des mots et des choses se dessine. "Moi, j’ai fait le choix d’aimer la vie. Des fois, je trouve qu’on aurait plus raison de l’haïr, mais la vie a besoin qu’on l’aime", clame-t-il. Lucide devant les dérives politico-économiques actuelles, il n’abandonne pas la plume à l’épée. "Ceux qui chialent qu’on n’est pas bien au Québec, je les enverrais voyager, moi. On est bien en tabarouette. Il y a des améliorations à apporter! Notamment au point de vue de nos dirigeants, puis il ne faut pas laisser tomber nos jeunes! L’éducation physique et les arts, on ne peut pas couper là-dedans!" Au centre de sa "zénitude" se trouve cette idée de suivre le cours des jours, comme la feuille portée par le vent, sans pour autant renoncer à son devoir humaniste.
Martin Léon a su reculer d’un pas pour observer son monde; ce point de vue lui donne une portée qui rappelle les grands, dont Cohen, qu’il interpelle dans L’enfer est sold-out. Influence palpable, tout comme celle de Vigneault: "Avec Cohen et Vigneault, c’est pas long, puis on parle des vraies affaires, de l’espoir, de la mort. On ne parle pas de la pluie, du beau temps, de la mode ou du prix des vêtements. Ces deux hommes-là, c’est des poutres avec des racines", commente l’élève avec révérence.
Des poutres aux planches, c’est au Cabaret La Basoche que Martin Léon amorce sa nouvelle tournée. "La tournée qui s’en vient n’est pas seulement celle de Facteur vent. J’ai pris les chansons que j’aimais le plus dans ma vie depuis 10 ans. Il y a des chansons de Kiki BBQ, du Facteur vent, d’autres genres aussi. Ça va être un show très acoustique, où on va se retrouver avec Mélanie Auclair [Lhasa de Sela, Michel Rivard, Robert Charlebois, etc.] au violoncelle, Alexis Dumais [Sagapool, anciennement Manouche] à l’orgue et Pascal Racine-Venne [Céline Boissonneault, Lust Out, Dibondoko] à la batterie. Je me sens fébrile, ça fait trois ans que je ne suis pas monté sur scène. C’est une nervosité constructive, j’ai hâte de partager ça avec le monde."
À écouter si vous aimez / Éloi Painchaud, Jean-Louis Murat, Daniel Bélanger