Sylvain Bergeron : Le manuscrit Balcarres
Le luthiste Sylvain Bergeron, cofondateur de La Nef, s’offre après moult collaborations un premier enregistrement solo, qu’il présente maintenant en récital.
On a pu le voir et l’entendre au fil des ans avec les ensembles Arion, Les Voix baroques, Les Violons du Roy ou Tafelmusik, pour ne citer que quelques-uns de ceux que l’on retrouve parmi la soixantaine d’enregistrements auxquels il a collaboré, mais Sylvain Bergeron est surtout connu pour sa participation aux projets toujours fort originaux de la compagnie musicale La Nef, dont il fut l’un des cofondateurs en 1991. Spécialiste du luth, du théorbe et de la guitare baroque, qu’il enseigne à l’Université de Montréal et à McGill, le musicien est en forte demande dans la très active communauté montréalaise de musiques anciennes, et ce n’est que tout récemment qu’il a enfin trouvé le temps de s’offrir un projet en solo. "C’est un projet que j’avais sur la table depuis longtemps, mais qui n’aboutissait pas en raison de mes diverses collaborations", explique-t-il. "L’automne dernier, je me suis gardé du temps pour le faire, et je me suis gâté avec quatre jours dans l’environnement magnifique du Domaine Forget."
Enregistré à la salle Françoys-Bernier du Domaine Forget en octobre dernier, le disque The Balcarres Lute Book fait entendre des extraits d’un manuscrit écossais de pièces pour luth datant du 17e siècle. "La musique écossaise m’attire depuis longtemps, et ce projet m’offre l’occasion d’un retour à mes sources, qui sont du côté de la musique folk." Les pièces du manuscrit Balcarres, dont la majorité sont attribuées à un "mister Beck" demeuré méconnu, sont en effet plus près de la musique traditionnelle que des savantes envolées de Bach, par exemple, et ont souvent des résonnances familières. "C’est une musique qui nous parle davantage que la musique savante de l’époque, que je respecte beaucoup par ailleurs, et je trouvais que c’était plus approprié pour un premier projet en solo."
Le luth baroque est en quelques sorte une guitare "extrême", et celui de Sylvain Bergeron, avec ses 13 choeurs (couples de cordes), semble démesuré. "C’est un instrument qu’il faut amadouer, commente le musicien. On peut passer de la guitare au luth de la Renaissance, qui a six ou sept rangées de cordes, sans trop de problèmes, bien que ça demande des ajustements, mais le luth baroque, c’est une autre machine! J’arrive d’une tournée durant laquelle je jouais du luth Renaissance, et j’ai une dizaine de jours pour me remettre le luth baroque dans les doigts… Il faut recalibrer le GPS!"
Dans les jours qui viennent, on pourra voir Sylvain Bergeron aux côtés du contre-ténor Daniel Taylor (le 24, à l’église Saint-Irénée, 514 872-2044), et il participera au Festival de musique sacrée de Québec à la fin du mois, avant de partir pour Edmonton, où il accompagnera Suzie LeBlanc dans L’Orfeo de Monteverdi. Le récital de luth qu’il présente nous offrira une rare occasion de le voir en solo.