Bïa : Coup de soleil
Bïa a la bougeotte. Elle avait hâte à cette nouvelle tournée. Nouvelle équipe aussi; nouveau répertoire. Ceux qui s’attendent à des lamentations mélancoliques risquent de prendre un sacré coup de soleil.
Qu’est-ce qu’elle parle bien, la Bïa. Sur scène comme dans la vie, cette fille est un exemple d’intelligence émotionnelle. Et c’est là qu’elle gagne à chaque fois. Cultivée et honnête, elle vient vous chercher avec sa guitare et sa poésie. Avec un brin de folie, mais en sachant toujours ce qu’elle fait, même en se laissant guider par l’intuition. "J’aime rire, j’adore rigoler mais j’ai les antennes syntonisées sur le monde où nous vivons. Je ne suis pas dans une bulle de gaieté vide", résume-t-elle dans un autoportrait vite fait.
Pas de grande voix ni de grands éclats – son registre n’a rien de véritablement exceptionnel. Mais avec une chaleur et une sincérité toujours tangibles qui nous obligent à embarquer dans son jeu, dans sa vérité. La preuve, le public l’a même suivie dans son dernier virage: un bouquet de nouvelles chansons généralement plus douces, plus mélancoliques, plus dépouillées.
BÏA NOCTURNE ET BÏA DIURNE
En effet, le succès critique de son cinquième album Nocturno a été assez stupéfiant. Même si ce compact n’a pas encore atteint les beaux chiffres de vente de ses prédécesseurs (Carmin, son troisième, avait même franchi la barre des 25 000 exemplaires au Québec), tout le monde a donné le crédit à l’artiste d’être allée jusqu’au bout d’un nouveau choix esthétique parfaitement assumé. Un disque marginal, en clair-obscur, avec des couleurs terreuses, des sonorités plus âpres et, avouons-le, plus sombres que les harmonies tropicales auxquelles la Sud-Américaine nous avait habitués depuis bientôt 10 ans. "Nous avons volontairement écarté d’autres compositions de ce projet parce qu’elles étaient, disons, trop solaires. Je ne voulais pas m’éparpiller. Il fallait vraiment que cet album soit tel qu’il est. Et c’était important pour moi de laisser carte blanche à Erik West-Millette, en tant que réalisateur. Je voulais qu’il y ait une signature."
Parce que Bïa reste une fille spontanée qui communique avec tellement de chaleur et de fantaisie, certains s’inquiétaient de la voir larguée dans des mélopées. On est drôlement rassurés de la retrouver enjouée et tout entière dans le nouveau tour de chant.
"Moi aussi, je suis contente de retrouver tout cela!" dit Bïa entre deux fourchettes avec un soleil dans la voix. "La dimension ludique surtout. Car on est tous des clowns. Mes copains sont de grands musiciens, mais ils sont drôles comme tout. Et j’ai beau être à l’aise avec tout ce dépaysement, Nocturno ne rend pas compte de tout ce que je suis. Voilà pourquoi, dans le spectacle, je m’approprie l’espace et l’ensemble du répertoire."
À écouter si vous aimez /
Bebel Gilberto, The Mosquitos, Monica Freire