Vadim Repin : Alter ego
Vadim Repin et Nikolaï Lugansky se réunissent au sommet avec Debussy, Stravinski et Beethoven. Une amitié au service de la musique.
Il est surprenant de voir réunis sur la même scène deux interprètes qui sont au sommet de leur art et de renommée internationale. Le violoniste Vadim Repin et le pianiste Nikolaï Lugansky correspondent à cette description. Deux raisons fondamentales expliquent ce duo exceptionnel: une passion commune pour la musique et une indéfectible amitié. "Je me trouve chanceux et c’est un défi de pouvoir partager la scène avec un soliste de la trempe de Nikolaï, avoue le violoniste. C’est aussi un immense plaisir de pouvoir faire de la musique avec un ami de longue date. La musique de chambre implique une proximité et une connaissance de l’autre. C’est un dialogue entre deux interprètes qui s’opère avec la musique d’un compositeur. Nous sommes au service de cette musique, mais le dialogue nous appartient."
Tous deux d’origine russe et de la même génération, les deux musiciens portent ensemble le flambeau de "l’école russe". Une expression qui résume la domination d’une génération d’interprètes, au milieu du siècle dernier, composée entre autres de David Oistrakh, Mstislav Rostropovitch et Sviatoslav Richter. Cette étiquette, Repin la remet en contexte et la relativise avec soin. "C’est une tradition imposante et c’est un privilège d’y être associé, constate-t-il. Mais la réalité n’est plus la même aujourd’hui. Je suis en ce moment à Los Angeles pour y jouer la musique que j’aime, et je peux le faire en Europe, en Asie et partout dans le monde. Nous ne sommes plus porteurs d’une nationalité, mais plutôt d’une musique. Et la musique, elle, n’a plus de frontières."
C’est en 1987 que le violoniste voit s’ouvrir le monde devant lui alors qu’il remporte le Concours Reine Elisabeth. Une récompense prestigieuse qui le consacre à… 17 ans. Mais le musicien a su gérer cette pression supplémentaire avec sagesse. "Être le plus jeune lauréat d’un concours aussi important prend beaucoup de place dans la vie d’un jeune homme. Aujourd’hui, les choses sont différentes. J’ai une famille et un fils. J’aurai bientôt 40 ans et j’ai une expérience de la vie qui contribue à enrichir l’interprète que je suis. Je crois qu’à titre de musicien, ce qui a le plus changé dans mon cas, c’est la relation que je cultive avec le temps. Le temps est un élément clé dans la musique. On arrive à un point où cette dimension est moins intimidante, et notre musicalité s’accorde alors plus facilement avec une partition."
En plus de la musique, les échecs semblent être une autre passion que partagent les deux interprètes. Le violoniste nous dévoile avec humour qui est le champion en la matière. "Nikolaï est pratiquement un professionnel des échecs, mais j’ai quand même du plaisir à jouer contre lui. Il existe des similitudes entre les échecs et la musique. Il y a des règles très strictes, mais les possibilités sont infinies. C’est pareil en musique: il y a plusieurs façons d’analyser et d’interpréter ce que nous avons en face de nous. C’est une liberté énorme et elle nous offre l’opportunité de nous dépasser."