Nicolas Gilbert : Littérature musicale
Le compositeur Nicolas Gilbert est l’un des plus prometteurs de sa génération et l’on peut entendre sa plus récente pièce ces jours-ci à Montréal. Ou lire son premier roman…
Abondamment récompensé pour sa production (Opus de la découverte de l’année 2005-2006, Opus de la création de l’année 2006-2007, entre autres) et largement reconnu par les ensembles montréalais, qui lui demandent régulièrement de nouvelles oeuvres, le jeune compositeur Nicolas Gilbert connaît déjà, à 29 ans, un succès plus qu’enviable. C’est d’abord en tant qu’interprète qu’il est arrivé au Conservatoire de musique de Montréal, en percussion: "J’y ai passé une dizaine d’années à compter de 1994, explique-t-il; quatre en percussion, puis j’ai bifurqué vers la composition, durant six ans." Il n’est pas inutile, pour situer le personnage, de savoir que durant ses études en composition, Nicolas Gilbert s’inscrivait aussi à l’université pour y apprendre… le mandarin! Avant, bien sûr, d’y aller pour faire un doctorat en composition auprès de John Rea.
Avec aujourd’hui un catalogue de plus de 30 oeuvres, le compositeur a le vent dans les voiles: "J’ai eu de la chance, convient-il, parce que j’ai rapidement reçu du soutien, notamment de la part de Véronique Lacroix avec l’ECM, et aussi du Trio Fibonacci, mais je suis aussi quelqu’un d’assez proactif!" La plus récente oeuvre à son catalogue, Le Temps des impossibles (Hommage à Olivier Messiaen), est une commande de la pianiste Louise Bessette, organisatrice des activités de l’Automne Messiaen, qui l’interprète avec Simon Aldrich (clarinette), Jonathan Crow (violon) et Yegor Dyachkov (violoncelle). L’oeuvre est construite avec la même instrumentation que le Quatuor pour la fin du temps de Messiaen, aussi au programme. "Ce sont des interprètes extraordinaires, avec lesquels je suis extrêmement heureux de travailler. C’est une chance de partager le programme avec Messiaen, explique Nicolas Gilbert, mais c’est aussi un sacré défi parce que sa pièce prend tellement de place dans un concert, à tous les niveaux! C’est beaucoup par l’analyse de ses oeuvres avec Michel Gonneville au Conservatoire que j’ai abordé la musique contemporaine et plusieurs d’entre elles m’ont beaucoup marqué."
Si on connaît quelques titres des oeuvres de Gilbert (par exemple, Ce que vit Kenjeke depuis la colline de Khabarovsk ou Les flammes sont des éponges ngànga et frappez – huit études dada en paires disjointes), on aura noté son goût pour la littérature, mais on aura quand même été un peu surpris lors de la parution de son premier roman, Le Récital, chez Leméac. Il y raconte, à travers les points de vue de six personnages (représentant du public, interprète, compositeur, etc.), une soirée de concert à la SMCQ (je simplifie!). "J’ai arrêté la composition durant trois mois pour l’écrire, commente-t-il, parce que c’était aussi important, la littérature étant également pour moi quelque chose de fondamental. Je peux lire quatre romans par semaine, et beaucoup de mes idées viennent de là, jusque pour la forme de certaines pièces." Le livre, comme la musique de Nicolas Gilbert, connaît actuellement un certain succès; espérons que ses lecteurs viendront au concert, et vice versa!