Guide d’achats 2008 : Urbain
Erykah Badu
New Amerykah, Part 1: 4th World War
(Motown/Universal)
Après cinq ans d’absence, Erykah Badu est revenue avec un album aux propos encore plus engagés que précédemment. Portraits de camés, réflexions sur les conséquences de Katrina et de la violence perpétrée par des Afro-Américains contre leurs congénères, réquisitoire impitoyable contre les échecs de l’Amérique de Bush en matière de santé, d’éducation et de justice: la sirène fait flèche de tout bois, sur des mélodies entraînantes et des grooves irrésistibles, dignes du meilleur soul des années 70. Le hip-hop aurait-il accouché d’un What’s Going On? pour le 21e siècle? (Stanley Péan)
Radio Radio
Cliché Hot
(Bonsound/Fusion3)
Formé de quatre rappeurs originaires des Maritimes, Radio Radio mise sur des rythmes électro-club champ gauche pour témoigner de sa culture distincte dans un langage chiac rarement entendu sur disque. Véritable vent de fraîcheur sur la scène hip-hop d’ici, le combo doit beaucoup à son interprétation, mélange d’anglais, de français et de vieux français livré non sans un accent fort sympathique. Grâce à son irrévérence et à son authenticité, Radio Radio fait sourire. On hoche la tête et on rêve de Moncton. Faut le faire. (Olivier Robillard Laveaux)
White Williams
Smoke
(Tigerbeat6)
Sur son premier album, le jeune bidouilleur de Cleveland fait preuve d’une étonnante maturité et d’une ouverture musicale peu commune. En fait, avec son ton coloré, langoureux et volontairement imparfait, on pourrait aisément comparer la musique de White Williams avec celle que faisait Brian Eno au début des années 70 ou encore, notamment dans la pièce In the Club, à Marc Bolan. Tout ça donne un album pop électro-organique inventif, audacieux et franchement rafraîchissant. (Patrick Baillargeon)
Mexican Institute of Sound
Piñata
(Nacional Records)
Paru juste un peu trop tard pour notre liste de fin d’année 2007, ce deuxième album du MIS est aussi sympathique qu’inventif! Comme sur le précédent Mejico, Maxico mais en plus travaillé et plus sexy, Camilo Lara (l’homme qui dirige l’Institut) propose un joyeux mélange de rythmes latins (cumbia, cha-cha-cha, danzon), de hip-hop, de baile funk, d’électro, de dancehall-reggae et de beats contagieux et rigolos. Ces musiques, pour la plupart irrésistibles, viennent quelquefois appuyer des textes ou simplement quelques paroles en espagnol et en anglais. (Patrick Baillargeon)
Guts
Le Bienheureux
(Wax on Records/Fusion3)
Guts est un beatmaker de première. Le truc au bidouilleur et D.J. parisien, ce sont les beats et les ambiances cool stoner chers aux Cypress Hill et autres Roots de ce monde. Élevé au funk, au vieux hip-hop festif, au reggae et aux pétards, l’ex-Alliance Ethnik multiplie les clins d’oeil et les références (la pochette et le titre nous ramènent au film Alexandre le bienheureux) avec un doigté irréprochable et beaucoup de style. Très sympa! (Patrick Baillargeon)
Nas
Untitled
(Def Jam)
Le neuvième opus du vétéran M.C. est acerbe à souhait et réglé au quart de tour. Moins introspectif que ses dernières parutions, politiquement chargé à bloc, Untitled dévoile un Nas en pleine possession de ses moyens. Tout au long des 15 titres, le rappeur s’éloigne des sentiers mainstream et s’attaque au racisme institutionnel, au système judiciaire et aux médias corporatifs avec la verve qu’on lui connaît. À vrai dire, l’homme n’avait pas paru aussi affamé, ambitieux et pertinent depuis l’époque dorée d’Illmatic, brossant ici un portrait saisissant de l’Amérique moderne. Du grand Nas. (Stéphane Martel)
Waldeck
Ballroom Stories
(Dope Noir/Fusion3)
Ballroom Stories est un disque où le jazz des années 30, le swing, le tango, le blues et les ambiances de film noir se marient parfaitement au reggae-dub et aux rythmes électroniques. Les jolies voix des deux chanteuses et du chanteur sont appuyées par l’accordéon, le piano, la contrebasse, le banjo, la guitare, la batterie, la clarinette et les nombreux cuivres des musiciens invités, le tout soutenu habilement et discrètement par l’enrobage électronique du producteur-bidouilleur autrichien Klaus Waldeck. On pourrait parfois penser aux Squirrel Nut Zippers passés à la moulinette Ninja Tune, si ça peut vous situer un peu. (Patrick Baillargeon)
Komodo
Subluna
(Sambal)
Le terme "world beat" sied parfaitement à la musique concoctée par Komodo. Sur cet album, le D.J. et producteur montréalais nous plonge dans un voyage exotique où les basses profondes du dub se marient aux rythmes d’Asie et du Moyen-Orient et aux sons de toutes sortes d’instruments tels que le ney, le santur, le tombak, le riq, le dayereh, le berimbau, le dholak, le saarangi et surtout le didgeridoo, que manipulent Komodo et plusieurs musiciens invités. Komodo vient se hisser parmi l’élite de la mouvance ethno-techno avec ce sublime Subluna! (Patrick Baillargeon)
Does It Offend You, Yeah?
You Have No Idea What You Are Getting Yourself Into
(Red Ink)
Connu sur les pistes de danse depuis qu’il a lâché la bombe incendiaire We Are Rockstar il y a près de deux ans, DIOY,Y? surprend avec ce disque au titre trop long. On attendait un petit frère plus punk que Daft, on a un gang de petits teigneux qui lorgnent sans complexe vers LCD Soundsystem, Fischerspooner et les sources new wave (Devo en tête). On pensait se moquer de clones de Justice, on a des musiciens qui désarçonnent avec des alliages réussis de britpop, d’électroclash et de néo-romantisme. On ne sait plus quoi penser finalement. (Patrick Baillargeon)
Osunlade
Passage
(BBE)
Référence ultime en matière de deep house riche et classieuse, Osunlade se permet ici une incursion sur le terrain de la musique électronique minimale et même du néo-dub. Doit-on alors parler de house minimale? Disons que ça pourrait bien correspondre à ça sur cet étonnant disque double (l’un mixé et l’autre pas). Osunlade effectue bel et bien un passage ici. Malgré le côté un peu plus répétitif et froid, l’ensemble demeure étonnamment chaleureux et plein de soul. (Patrick Baillargeon)
The Bug
London Zoo
(Ninja Tune)
The Bug est un des nombreux pseudos du docteur ès dub Kevin Martin. Le Britannique débarque ici avec une série de pièces bien pesantes, pour aficionados de basses fréquences. Toujours à l’affût des dernières couleurs et humeurs du dub électronique, la bibitte a concocté une trame cauchemardesque, urbaine à l’os. Si les origines jamaïcaines de cette musique sont plus perceptibles grâce aux nombreux toasters ou M.C. qui interviennent dans les 12 pièces que contient ce London Zoo, l’ensemble demeure sombre et menaçant. (Patrick Baillargeon)