Lily Frost : Le souffle de Billie
Musique

Lily Frost : Le souffle de Billie

Pour rendre hommage à un ami disparu, Lily Frost délaisse son répertoire lounge pop et chante Billie Holiday à la manière western swing.

Jointe à Toronto, la charmante Lindsey Davis, alias Lily Frost, nous propose d’emblée de faire l’entrevue en français. On accepte avec plaisir car son accent est plutôt… craquant!

Il ne faut pas se surprendre de la francophilie de la chanteuse canadienne, qui revient d’ailleurs d’un court séjour en France. Elle y était afin de promouvoir son album Cine-Magique, qui vient d’être lancé là-bas. "Les Français comprennent ce que je fais, beaucoup plus que le Canada anglais. Je suis inspirée par la chanson française des années 60. Les ballades, le storytelling, la politique, la poésie, l’énergie, la sentimentalité… Tout ça, j’adore!"

PSYCHIQUE ET ROMANTIQUE

Pour Lily Frost, chanter est un acte spirituel… ou même, un pouvoir psychique. "La musique, c’est pour moi une façon de me connecter avec les gens… dans une autre dimension. Quand j’étais petite, j’avais l’impression de pouvoir lire dans la tête des gens. Plus grande, j’ai compris que c’était impossible, mais en spectacle, je réussis à être en accord avec toutes les personnes dans la salle."

Mais parfois, le chant relève également de la séduction. "J’ai chanté une chanson en espagnol sur le répondeur de mon mari [Jose Contreras du groupe By Divine Right] à nos débuts. Après, il m’a dit: "Tu veux que je tombe amoureux de toi?", et j’ai dit oui. Tu vois, ça marche comme ça aussi", dit-elle, enjouée.

POUR RAY

Sur ses différents disques, Lily Frost explore un univers allant de la bossa nova au rockabilly. Toutefois, sur Lily Swings, le petit dernier sorti en 2008, elle met ses compositions de côté le temps d’un délicieux hommage à la célébrissime Billie Holiday. Pour Frost, ce projet est également un clin d’oeil à Ray Condo, leader de la formation The Swinging Dukes, décédé en 2004. "Son groupe existe encore à Vancouver. J’ai pensé que ce serait intéressant de faire un album avec ses musiciens. Tout comme moi, il était en amour avec la musique de Holiday. C’était un bon ami, un mentor. J’ai voulu faire ce disque pour lui."

Le défi était de taille. Pour plusieurs, Billie Holiday est une icône, une intouchable. "À 19 ans, j’ai entendu ses chansons. J’ai essayé de les chanter et c’était tellement difficile. J’étais curieuse. Il y avait quelque chose que je ne comprenais pas. Elle a une façon de jouer avec le rythme qui n’est pas rationnelle. Ça part d’elle. Personne ne peut faire la même chose." Frost a donc fait ce disque à sa façon – et c’est pourquoi il est une grande réussite -, tout en démystifiant certains des secrets du chant de Holiday. "J’ai appris comment prendre un grand souffle avant de chanter. C’est beaucoup plus lent, behind the beat. Ça a changé ma façon de chanter mes propres chansons."

À Sherbrooke, c’est le spectacle de Lily Swings que la chanteuse viendra présenter. Elle y sera en compagnie d’un groupe western swing de Toronto, The Debonairs. "C’est un jazz très upbeat. Vous pourrez danser si vous le voulez!"

À écouter si vous aimez /
Feist, Regina Spektor, Billie Holiday

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LILY PUNK

C’est au Québec que Lily Frost a fait ses débuts comme chanteuse, alors que la scène garage punk montréalaise était en très grande forme. "En 1989, j’ai déménagé à Montréal pour faire mes études à Concordia. Je suis aussi tombée amoureuse d’un musicien qui jouait dans un groupe, The Minstrels. J’ai également rencontré le bassiste des Gruesomes, John Davis. Il m’a demandé de chanter dans son groupe, The Sheiks, qui fut l’une des premières formations grunge. Ce fut le premier groupe avec lequel j’ai chanté. On a eu de très mauvaises critiques", se remémore-t-elle tout en rigolant.