Tricky : Douce banlieue
Musique

Tricky : Douce banlieue

Tricky reprend la route pour présenter son dernier effort, Knowle West Boy, un disque qui retrace son enfance dans la zone.

Il est en forme, le Tricky. Positif. Au bout du fil, de la voix éraillée du fumeur de pétards invétéré qu’il est, il plaisante, le ton enjoué. Parce qu’avec Tricky, une entrevue peut vite devenir pénible quand il est dans une de ces humeurs sombres ou, surtout, lorsqu’il est tellement explosé qu’il a du mal à aligner deux phrases.

En fait, depuis la sortie de son huitième album, Knowle West Boy, le controversé chanteur britannique semble sur une bonne voie. Car il aura mis cinq ans avant de compléter ce disque. Cinq années à errer entre New York et Los Angeles à la recherche d’inspiration, d’une autre vibe, d’une paix intérieure. Paradoxalement, c’est justement à des milliers de kilomètres de sa banlieue pourrie de Bristol que Tricky s’est mis à chanter sur sa ville et son passé. Le Knowle West Boy, c’est lui. Fils d’un père qu’il n’a jamais connu et d’une mère qui s’est suicidée lorsqu’il avait 4 ans. Un gamin élevé par une grand-mère qui l’encourageait à regarder des films d’horreur plutôt qu’à aller à l’école, un gamin qui a fait les quatre cents coups avant d’aboutir à l’ombre pour quelques mois. Un gamin qui aurait pu sombrer si ce n’était de la musique. "Knowle West est une banlieue très pauvre de Bristol. Il y a des Blancs, des Noirs, des gens de partout, mais la seule chose qui les unit, c’est la pauvreté, précise Tricky. Je vivais dans un council estate, qui est en quelque sorte une série de logements à loyer modéré, une sorte de HLM quoi. C’était dur à l’époque, et les choses ne se sont pas arrangées avec le temps. Maintenant, c’est encore pire qu’avant. Lorsque j’étais jeune, on se bagarrait à coups de pied et de poing, là les gamins se baladent avec des flingues et tirent n’importe qui pour n’importe quoi. Mon cousin s’est justement fait descendre récemment…"

"Certains ont dit que Knowle West Boy est mon meilleur disque depuis mon premier, Maxinquaye (du nom de sa mère, Maxine Quaye). Je ne suis pas d’accord. C’est un bon disque, mais ce n’est pas un de mes meilleurs", avoue franchement cet ancien collaborateur de Massive Attack. "Pour moi, c’est du passé. Mon prochain album sera bien mieux, tu vas voir. En fait, je vais faire paraître deux disques cette année, si tout va bien. Un avec un seul chanteur qui m’accompagne (Tricky n’a jamais chanté seul sur un album) et un autre avec 14 chanteurs différents. Avant, je courais d’une ville à l’autre. Là, je me suis installé un studio dans mon appartement de L.A. et toutes mes affaires sont au même endroit. Je ne sais pas si je resterai dans cette ville longtemps, mais une chose est sûre, je ne retournerai pas à Knowle West!" tient à souligner celui que plusieurs considèrent comme le père du trip-hop. "Trip-hop est un nom stupide créé par des gens qui ne comprenaient pas ma musique. C’est nul."

En concert, Tricky n’en fait qu’à sa tête. S’il n’a pas envie de se lancer dans certaines chansons qu’il a peut-être jouées la veille, il en fera d’autres à la place. "Je me laisse inspirer par le moment. Je ne joue jamais la même chose d’un spectacle à l’autre. De toute façon, je ne me rappelle pas de ce que j’ai joué la veille, rigole-t-il. Il n’y a pas de structure précise, et les musiciens qui m’accompagnent (guitare, basse, batterie, clavier, choriste) connaissent toutes mes chansons, donc ils sont prêts à tout."

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