Ensemble Constantinople : Au centre du monde
Musique

Ensemble Constantinople : Au centre du monde

L’Ensemble Constantinople nous dépeint une rencontre entre l’Orient et l’Occident qui prend racine dans la ville dont il porte le nom.

Tenter de résumer l’histoire de Constantinople à l’intérieur d’un seul concert et s’en inspirer pour projeter ce symbole dans le futur, voilà qui est audacieux. L’Ensemble Constantinople et son directeur artistique Kiya Tabassian nous proposent un programme qui fait le récit musical d’une forme d’utopie. La genèse d’une cité qui était un carrefour de rencontres multiculturelles au caractère artistique, économique ou politique. Ce concert, intitulé La Sublime Porte, illustre bien les intentions du membre fondateur de l’ensemble qui se spécialise en musique ancienne.

"On part du 13e siècle et on avance assez rapidement, explique-t-il. La tradition soufie est le point de départ de ce voyage dans le temps. On passe aussi par la musique de la cour ottomane. On s’en inspire pour composer et on y intègre de la musique contemporaine. Et bien sûr, on image ce que l’on entend, aujourd’hui, dans les rues d’Istanbul. Constantinople, c’était une ville ouverte sur le monde. Il y avait une concentration très importante d’ambassadeurs, par exemple. C’était une capitale du monde."

Ce concert intègre aussi le DJ Mercan Dede (Arkin Allen). Un mariage surprenant dans lequel échantillonnages et instruments traditionnels (setâr, oud et percussions) se fusionnent. "Nous le connaissons depuis plusieurs années, son travail aussi, avoue-t-il. C’est un artiste qui est très sensible à la tradition soufie. Il a réussi à transformer cette musique et il en fait un traitement naturel et cohérent."

Le travail de Tabassian est ancré dans une recherche historique qui pousse le compositeur, né à Téhéran, à faire un exercice d’assimilation et de métissage. Une démarche qu’il semble avoir apprivoisée avec rigueur. "Lorsqu’on parle du soufisme, on parle d’une philosophie et d’une tradition très fortes. Mais une tradition ne se résume pas à être un dogme. Elle doit avancer et continuer d’apprendre, elle aussi. Un musicien qui veut s’inspirer d’une tradition doit s’y retrouver. Pour s’y retrouver, il faut la connaître et savoir ce que l’on veut communiquer à travers elle."

Un exemple fort à propos, la présence de la danseuse Tanya Evanson, qui accompagne les musiciens lors de cette tournée. "Habituellement, la danse derviche est pratiquée uniquement par des hommes. Pour nous, c’était l’occasion de démontrer que cet art s’est ouvert au monde et qu’il trouve une expression unique à travers le travail de Tanya."

Un libéralisme aux couleurs de l’Orient. Sans être politique, le travail artistique de l’Ensemble Constantinople démocratise à sa façon une culture universelle. "Les textes soufis de Jalâl ud Dîn Rûmi, le poète le plus connu de cette tradition, témoignent avant toute chose d’une ouverture d’esprit. Ils soulignent l’importance de faire le vide pour mieux être ouvert à ce qui nous entoure. C’est un message d’amour."

À écouter si vous aimez /
Sharam Nazeri, Eduardo Paniagua et Sussan Deyhim