Gilles Vigneault : Langue verte
Musique

Gilles Vigneault : Langue verte

Gilles Vigneault fait peau neuve avec des chansons originales toutes fraîches et un nouveau spectacle. Entre musique et poésie, il n’hésite pas: il chante une langue toujours vive.

C’est dans le calme et la confiance qu’on aborde un nouveau disque de Gilles Vigneault. Pas de brouhaha médiatique, de publicité outrancière. Juste une envie, retrouver une voix qui accompagne la marche du pays depuis un demi-siècle. Cette fois-ci, ça s’appelle Arriver chez soi, un titre qui a un sens bien particulier dans la bouche de l’interprète: "Pour moi, ça signifie arriver à l’intérieur de soi. Mais pour ça, il faut en être sorti un jour. Chanter, parcourir des milliers de kilomètres, écrire… pour un jour rentrer chez soi de nouveau et se demander s’il reste encore des choses à dire, du bagage qu’on a oublié." Comme un paysage intérieur que l’on peut trimballer avec soi.

La pochette du CD est teinte de vert et de bleu, apaisée et inquiète – ça se lit dans les yeux du chanteur. Entre les chansons tendres, dont une berceuse, on cause d’écologie, de misère sociale, de technologie (surprenantes Une journée sans portable et Internaute). Tantôt avec sérieux, tantôt avec humour, dans une langue toujours colorée et évocatrice: "Les mots, le prologue du disque, c’est un petit poème qui parle des mots fragiles, comme forêt et mer, qui ont dicté à la graphiste Marie-Josée Chagnon ce qu’elle devait faire. Elle a fait du très beau travail. L’idée d’aller chercher des cailloux, c’est poétique et simple à la fois." Dirait-on la même chose des nouvelles chansons? D’une évidente beauté.

Tout coule de source dans cet opus. Rien pour faire grincer l’oreille. Ainsi, les arrangements de Bruno Fecteau emportent magnifiquement les chansons avec eux. Ils les soulèvent comme une vague. Le moins qu’on puisse dire, c’est que Vigneault sait s’entourer: "C’est toujours moi qui choisis les gens avec qui je travaille, mais bien sûr je consulte ma fille Jessica et mon épouse. J’étais très satisfait des arrangements, sauf sur une chanson (Jack Tattoo) où j’espère avoir un côté plus country pour le spectacle. Mais pour le disque, c’était très bon. Je participe aux arrangements. Quand ils sont finis, je critique, je dis mon mot, mais honnêtement, je n’ai pas beaucoup d’influence là-dessus et je ne tiens pas à en avoir, parce que je ne suis pas un musicien professionnel." Ce qui ne l’a jamais empêché de composer lui-même ses mélodies avec l’aide de ses collaborateurs (jadis, Gaston Rochon, aujourd’hui Bruno Fecteau).

L’homme de presque 80 ans au bout du fil est rieur et allumé. Il se prépare à remonter sur scène avec un nouveau spectacle, Chemin faisant, un titre qu’il avait déjà utilisé en 1990 pour un coffret de ses enregistrements. Une nouvelle biographie (québécoise cette fois) verra le jour bientôt. Les projets ne manquent pas, la sève non plus.

À écouter si vous aimez /
Anne Sylvestre, Félix Leclerc, Marie-Claire Séguin