André Laplante : Salement romantique
Liszt et Chopin joués par le pianiste André Laplante? Une combinaison gagnante pour un récital romantique.
Changement de programme. Le Festival Orford annonçait qu’André Laplante y jouerait Chopin en entrée et Liszt au dessert, mais on aura droit à l’ordre inverse. "Ce déroulement est plus intéressant. Il y a plus de climax, de build-up", précise le pianiste de renommée internationale. Un menu des plus appétissants, surtout que le musicien a récemment triomphé avec ce brillant programme romantique. "Dans Les Années de pèlerinage de Liszt, il y a neuf pièces; plusieurs sont méditatives. Le groupe se termine avec la nocturne, qui est plus intérieure. Ça laisse une impression très poétique."
Deux nocturnes de Chopin entameront la deuxième partie du concert. "Ça permet de rester dans cette atmosphère. Ensuite, on a la Sonate n° 2, qui est une des grandes oeuvres pour piano, une des apogées… et c’est Chopin! Ça permet de conclure ça en beauté."
ROMANTIQUE MALGRÉ TOUT
Plusieurs distinctions ont jalonné le parcours de ce virtuose. Le concours international Tchaïkovski de Moscou qu’il a remporté en 1978 est sûrement l’un de ses hauts faits d’armes. "Ça m’a fait connaître partout dans le monde, mais à partir de ce moment-là, j’ai eu le label romantique." Un titre lourd à porter? À cette question, le pianiste hésite. "La seule réponse honnête que je peux vous donner, c’est que oui, ce fut parfois difficile. Si on gagne un prix dans un concours comme ça, c’est pour le mérite artistique, autant que pour le mérite pianistique."
Ne voulant pas se cantonner à la période romantique, André Laplante a su par la suite démontrer sa grande aisance dans d’autres répertoires, dont le classique (Mozart, Schubert…). "J’ai atteint un équilibre. Je peux jouer un concerto de Mozart une semaine et la suivante, un concerto de Liszt. Je me sens très bien là-dedans."
TRAVAILLEUR ACHARNÉ
L’immense talent d’André Laplante est une vertu davantage acquise qu’innée. Il est considéré comme un travailleur acharné. "Absolument, nous confirme-t-il. Je suis dans la classe des "pratiqueux", mais j’essaie de rester équilibré. Un musicien a déjà dit: "Moi, je suis capable de travailler toute l’année, pourvu que l’année ait 11 mois"."
Carrière internationale oblige, André Laplante délaisse parfois son propre piano pour voyager d’une ville à une autre. Pour lui, jouer devant un public est l’aboutissement d’une démarche hautement réfléchie. "C’est un peu scientifique, mais surtout émotionnel. On va sur scène pour communiquer une émotion, ou on ne le fait pas. Moi, j’ai décidé de le faire." Et c’est pour notre plus grand plaisir.
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LA P’TITE OU LA GROSSE
C’est en interprétant le Concerto n° 3 de Rachmaninov qu’André Laplante a conquis le jury du concours Tchaïkovski. Il est possible de jouer cette oeuvre selon deux cadences. Laquelle avait-il choisie? "Chez les pianistes, on demande: "Joues-tu la p’tite ou la grosse?" (rires) Moi, j’ai joué la petite. Elle a une ligne, une conclusion, que je trouve plus intéressante parce que ça commence plus légèrement. Ça donne un immense climax; ça devient plus héroïque. L’autre commence un peu sombrement, lourdement; ça n’a pas le même effet. C’est moins contrastant."