Dave Brubeck : Quand le jazz est là…
Musique

Dave Brubeck : Quand le jazz est là…

Joint au téléphone alors qu’il roulait sur l’autoroute, le pianiste Dave Brubeck se réjouit de revenir fêter au FIJM le succès jamais démenti de son album Time Out, paru il y a 50 ans.

"Il a bien tenu le coup au fil des ans", dit Dave Brubeck, laconique mais sans une once de fausse modestie, à propos de Time Out. "La preuve, c’est que tant de gens aient encore envie d’écouter cette musique."

Et comment! Toujours aussi populaire 50 ans après sa sortie, l’album charnière du pianiste se classe au rayon des indispensables de toute discothèque idéale. Pas mal pour un disque né d’une volonté manifeste (appuyée, diraient certains) d’élargir le vocabulaire rythmique du jazz et signé par un homme qui, à l’origine, n’avait pas la moindre ambition de devenir musicien professionnel et se destinait au contraire à s’établir dans le ranch familial. "Je ne savais pas à l’époque qu’il s’agirait d’un moment-clé dans ma carrière; j’essayais juste de faire un nouvel album, d’emprunter une nouvelle voie", explique l’ex-figure de proue du cool jazz, qui se rappelle avec délectation l’étonnement sur le visage des patrons de Columbia. "Les pauvres n’avaient pas la moindre idée de ce qu’on avait fait."

Sans idéaliser l’époque de ses plus grands succès, Brubeck identifie sans hésiter ce qui la distingue de l’ère actuelle, en termes d’importance accordée au jazz. "À l’époque, cette musique faisait partie de nos moeurs, par opposition à aujourd’hui où elle semble intéresser principalement les étudiants d’université qui l’analysent et la décortiquent." Du même souffle, le virtuose évoque le statut d’ambassadeurs que quelques collègues et lui s’étaient vu attribuer par la Maison-Blanche. "C’est via le jazz plus que par n’importe quel autre biais que notre idée américaine de la démocratie a été propagée à travers le monde. Quand, en 1958, il nous a envoyés en tournée au Moyen-Orient et en Extrême-Orient, le président Eisenhower nous voyait comme une manière culturelle de combattre l’impérialisme russe dans ces régions. Nous avons joué en Pologne, en Turquie, en Afghanistan, au Pakistan, en Inde, en Iran et en Irak. C’est dire combien il avait foi en ce pouvoir du jazz de rapprocher les gens, les peuples."

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