Ornette Coleman : Les chemins de la liberté
Musique

Ornette Coleman : Les chemins de la liberté

Ornette Coleman a beau être le père du free jazz, il ne fait toujours pas l’unanimité. Ce qui ne l’empêche pas de se voir décerner le Prix Miles-Davis du FIJM 2009.

"À l’époque, dominaient un certain rhythm’n’blues d’une part et la musique de film, complètement accessoire, de l’autre. Même dans la musique dite improvisée, on jouait toujours les mêmes successions d’accords dans les mêmes tonalités", rappelle Ornette Coleman au sujet des années de son entrée en scène révolutionnaire. Un demi-siècle après la sortie de ses albums-phares (Shape of Jazz to Come, Change of the Century et, surtout, l’emblématique Free Jazz), le jazz libertaire mis de l’avant par ses complices de la première heure (le trompettiste Don Cherry, le contrebassiste Charlie Haden, etc.) et lui ne suscite toutefois pas une adhésion unanime.

Pourtant, le multi-instrumentiste texan (saxophoniste d’abord, mais aussi violoniste et trompettiste à ses heures) s’inscrit de son propre aveu dans la lignée du blues et bebop, lui aussi jugé révolutionnaire au début. "Je suis né à Fort Worth, une sorte de Mecque pour ce qu’on pourrait appeler les musiques de nuit, le blues, le jazz et tout ça. Parker, Monk et les autres, je crois qu’ils ont fondé une musique instrumentale qui obéissait aux mêmes principes que la musique vocale. C’est ce qui m’a fait comprendre que la qualité de l’émotion était une affaire simplement humaine."

Et si certains champions de la première révolution du jazz moderne ont exprimé du scepticisme à l’égard des avenues musicales proposées par Coleman, peu se sont montrés aussi hostiles que Miles Davis, qui attribuait le succès du free jazz à la volonté d’une clique de critiques blancs de s’approprier une musique rébarbative qu’ils seraient seuls à célébrer. Ce point de vue rend pour le moins paradoxale l’attribution du Prix Miles-Davis au saxophoniste; d’ailleurs, même le directeur artistique du FIJM, André Ménard, en entrevue à Radio-Canada, semble peu enthousiasmé par ce choix.

Aux commentaires acerbes proférés autrefois par le trompettiste à son sujet, Ornette Coleman choisit cependant de ne pas répondre. "Je ne ressens aucune animosité à l’égard de qui que ce soit pour des questions de savoir; le savoir n’est qu’une idée, affirme-t-il, philosophe, éludant ma question. Nous nous comprenons, vous et moi, sur la base de notre reconnaissance des mots que nous utilisons. Les sons ont le même effet sur les émotions, c’est tout."

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