Amy Millan : Y’a les mots
L’auteure-compositrice Amy Millan délaisse Stars et Broken Social Scene l’instant d’une deuxième aventure solo – qu’elle présentera lors de son passage au Festival folk d’Ottawa.
"I’m really really sorry!" L’entrevue débute d’une bien drôle de façon avec une Amy Millan qui se confond en excuses. Après être tombé sur une boîte vocale – "Bonjour, vous avez joint Amy. Laissez un message" – lors d’une première tentative d’entrevue, on joint finalement, un jour plus tard, la charmante chanteuse qui jongle bien malgré elle avec des horaires qu’on pourrait aisément qualifier d’impossibles. "Je suis désolée. Hier, j’avais mon chapeau de Stars sur la tête! C’est la raison pour laquelle je n’ai pas pu répondre, j’étais absorbée par le travail. J’ai six projets en tête, dont mon album solo, l’enregistrement du nouvel album de Stars et, en plus, je suis présentement au volant. Il y beaucoup de choses qui se passent en même temps!" s’exclame-t-elle en riant.
Il faut assurément avoir le coeur léger et à l’ouvrage pour pouvoir entreprendre tous ces projets en gardant la tête froide. En près de 15 ans de carrière, Amy Millan peut toutefois se vanter de s’être monté un curriculum bien garni avec sa place au sein du collectif torontois Broken Social Scene ainsi que dans la formation indie-pop Stars. Ces deux projets menés de front ont forgé sa personnalité scénique et lui donnent la soif de futures avenues solo. Celle qui nous intéresse en ce moment, Masters of Burial, un recueil de onze titres indie-folk romantiques, paraîtra le 8 septembre et mettra à jour une autre facette de l’artiste. "Je crois que ce deuxième album a beaucoup plus de cohésion, avance la chanteuse et guitariste. Quand j’ai commencé à enregistrer Honey from the Tombs (premier opus acclamé par les critiques), je n’avais pas encore de band. J’ai demandé alors à mes compadres de participer à l’album. Ce fut différent pour Masters of Burial, où j’étais très excitée de faire entrer en studio les membres de mon vrai band, qui sont tous des musiciens géniaux. Ça offre donc un son plus uni, une ambiance plus soutenue."
LES MOTS DES AUTRES
Sur cette deuxième aventure solo, Amy Millan tenait non seulement à enregistrer ses propres compositions, mais également à mettre sur disque quatre chansons nées d’autres plumes, à commencer par Old Perfume, ballade de sa comparse canadienne Sarah Harmer. "J’ai longtemps été séduite par Old Perfume. J’ai rencontré Sarah pendant un week-end à un chalet et elle l’a chantée autour du feu. J’ai pensé que c’était l’une des plus belles chansons jamais écrites." Outre Old Perfume, Millan souligne la présence de la splendide I Will Follow You into the Dark (originellement de Death Cab for Cutie). "J’ai appris à jouer cette chanson quand nous étions en tournée en direction de Calgary et j’ai tout de suite pensé qu’il fallait absolument que je la chante. Je trouve intéressant le fait que ce band américain fasse mention de cette ville albertaine." Les deux autres reprises sélectionnées sur Masters of Burial – Day to Day de Jennifer Whiteley et Run to Me de Richard Hawley – constituent elles aussi des trésors qui ne pouvaient tout simplement pas rester cachés.
TOUS CES MOTS QU’ON NE SE DIT PAS
Si Amy Millan a utilisé les vers des autres comme hommage ou de façon à donner une seconde vie à quelques bijoux bruts, elle chante les siens pour décrire les méandres que prennent les humains dans leurs relations interpersonnelles. D’où le titre Masters of Burial ("les maîtres de l’enfouissement"), faisant référence à la plupart d’entre nous, dont le dialogue correspond peu souvent avec ce qui émane de notre énergie ou de notre gestuelle. "Je suis fascinée de voir comment les êtres humains interagissent les uns avec les autres, et à quel point ce qu’on dit et ce qu’on exprime sur nos visages révèlent deux histoires totalement différentes. On enfouit beaucoup de choses qu’on voudrait dire dans le but de paraître normal et d’agir de façon acceptable. J’essaie de mettre en mots ces tremblements de lèvres, ces regards lancés… qui signifient tellement plus que les mots proprement dits! C’est ce que mon album tente d’accomplir", conclut de façon rêveuse la chanteuse.
À voir si vous aimez / Feist, Sarah Harmer, les vêtements empreints d’un parfum nostalgique