Bori : Le canard déchaîné
Bori se dévoile et nous offre une fresque musicale à la fois fellinienne et polémique. Place à la chanson qui vaut mille images.
Antoine Léveillée
Photo : Richard Tessier
Oui, il sort maintenant à visage découvert. Une transformation qu’Edgar Bori prend toutefois à la légère. Comme il l’indique, il était rendu là et l’abcès est maintenant crevé. "Quarante-huit heures avant le lancement de l’album, on a décidé d’y aller à visage découvert pour les médias, précise-t-il. Je ne voulais pas jouer la carte de la curiosité. Voir des gens aux spectacles qui n’auraient qu’une seule idée en tête: on va lui voir la face! Je voulais que ça se fasse tout simplement."
Après Dans ce monde poutt poutt, presque trois années se sont écoulées avant de revoir l’auteur-compositeur-interprète avec son tout dernier, Fous les canards. Il faut comprendre qu’en plus de cohabiter avec son alter ego, l’artiste est avant tout un artisan de la chanson et dirige une boîte de production, Les Productions de l’onde. Prenons par exemple Catherine Major, dont l’album Rose sang est paru sur son étiquette de disques. Une belle réussite, et une artiste qu’il va sans doute perdre au profit de Spectra. Guy-Philippe Wells et Gaële, entre autres, s’ajoutent à la liste de cette irréductible maison de disques.
"Ça nous garde occupé. C’est ce qui a retardé un peu la sortie de cet album. L’autre raison, c’est que mes arrangements requéraient beaucoup de musiciens, et des bons, comme Anthony Rozankovic, qui a collaboré aux arrangements. Il fallait monter un agenda qui satisfasse tout ce beau monde."
Et l’auteur n’a rien perdu de sa hargne contre l’injustice qui nous entoure. La chanson Ils, par exemple, nous montre un auteur qui fait preuve d’une lucidité implacable en face de cette "machine" insensible qui gouverne et manipule notre société. "Le problème, c’est de savoir c’est qui les responsables. Malgré tout, je voulais quand même leur cracher en pleine face. C’est un texte qui me ressemble, comme auteur, avec cette atmosphère qui fait Léo Ferré. Par contre, je ne suis pas moralisateur, ça ne m’intéresse pas de partir le poing en l’air. C’est tout simplement le portrait d’une situation telle que je la vois. Mais le refrain est très clair: "Ils sont qui ces peu qui creusent sans gêne le genre humain?""
Bori
Fous les canards
(Les Productions de l’onde)
À écouter si vous aimez /
Léo Ferré, Guy-Philippe Wells, Gianmaria Testa