The Musical Box : Feel Collins

Dans Almost Famous, de Cameron Crowe, une des premières scènes voit le jeune protagoniste recevoir en cadeau la collection de vinyles de sa grande soeur, qui fait ainsi de lui un fan pour toujours du rock des années 70. À quelques détails près, la même chose m’est arrivée lorsque mon père, converti aux disques compacts, m’a refilé son tourne-disque et ses 33 tours alors que j’étais adolescent. Mon éducation musicale s’est donc faite au son de groupes tels que Pink Floyd, Led Zeppelin, Queen, Kiss, The Who… Et, plus que tout, j’ai été marqué par les extraordinaires microsillons que Genesis a enregistrés à l’époque où Peter Gabriel était le chanteur de la formation.

De toute évidence, les membres de The Musical Box ont aussi été profondément affectés par ces albums, eux qui, depuis près de 15 ans, reproduisent méticuleusement sur scène les arrangements complexes des pièces qui s’y retrouvent. Le chanteur du groupe, Denis Gagné, se souvient encore de son premier contact avec la musique de Genesis, à l’âge de 10 ans: "Le premier album que j’ai entendu, c’est Foxtrot, que mon grand frère avait apporté à la maison, et la première chanson de Genesis que j’ai entendue de ma vie, c’est Supper’s Ready", explique-t-il, faisant référence à l’épique chanson qui occupe toute la face B du disque. "J’étais assis avec la pochette dans les mains, je suivais les paroles, et ça a marqué ma vie. J’ai acheté l’album et j’ai dû écouter Supper’s Ready au moins trois fois par jour pendant des mois."

L’initiateur du projet The Musical Box, Sébastien Lamothe, a lui aussi eu le coup de foudre en découvrant les premiers albums du mythique groupe anglais. "Il avait été frappé par l’image de la pochette de Genesis Live (1973), et c’est ça qui lui a donné le goût de refaire les spectacles de Genesis", raconte Gagné.

DE PETER GABRIEL À PHIL COLLINS

Jusqu’à maintenant, The Musical Box avait monté trois spectacles, respectivement consacrés aux disques Foxtrot (1973), Selling England by the Pound (1974) et The Lamb Lies Down on Broadway (1975), en plus d’incorporer quelques chansons de Trespass (1970) et de Nursery Cryme (1972) ici et là. Le matériel conçu après que Peter Gabriel eut quitté Genesis n’avait toutefois pas été effleuré, ce qui est compréhensible quand on pense à la tangente pop qu’a prise le groupe à partir des années 1980, alors qu’il a presque entièrement abandonné ses racines progressives. "C’est assez évident qu’on préfère la période des années 1970, admet Denis Gagné. Je ne veux rien enlever à ce qu’ils ont fait par la suite, mais c’est autre chose."

Par contre, si l’on remonte à 1976 et à l’album A Trick of the Tail, le premier sur lequel le batteur de la formation, un certain Phil Collins, est devenu le chanteur principal, c’est une autre histoire. On avait ici droit à une oeuvre tout aussi riche et exaltante que celles qui l’avaient précédée et où, de surcroît, Collins semblait s’efforcer de chanter comme Gabriel. "C’était la première tournée de Phil Collins en tant que frontman, et tu voyais qu’il essayait de respecter ce que Peter Gabriel avait fait. Alors que par la suite, il a découvert ce que devait être son style de chanteur et il a adapté les pièces en conséquence."

L’ENDOSSEMENT DE GENESIS

Tel que mentionné, le répertoire du spectacle que promène présentement The Musical Box inclut plusieurs pièces que le groupe n’avait jamais jouées précédemment, mais aussi un bon nombre de chansons qui sont toujours des moments forts de leurs concerts. "Il y a cinq pièces d’A Trick of the Tail [Dance on A Volcano, Entangled, Squonk, Robbery, Assault and Battery et Los Endos], puis il y a un medley Lamb Lies Down on Broadway, que Phil s’amusait à appeler "lamb casserole" ou "lamb stew"! Et pendant cette tournée-là, ils refaisaient aussi des classiques tels que Supper’s Ready, The Cinema Show, Firth of Fifth…"

En plus de recréer parfaitement les set lists originaux de Genesis, les membres de The Musical Box tentent par tous les moyens de présenter les mêmes éclairages, costumes, projections et effets spéciaux que leur inspiration. "Celui qui a fabriqué le laser de Genesis pour la tournée A Trick of the Tail, qui était le premier laser utilisé sur scène de l’histoire du rock, est aussi celui qui en a fabriqué un pour nous. Il n’y en a pas de niaisage, on va jusqu’au bout de la patente! Le gars qui a fait le laser m’a même montré de quelle façon Phil Collins le manipulait à l’époque, révèle Gagné. C’est ce souci du détail qui a fait notre réputation. Le premier objectif de The Musical Box, c’est de donner aux gens l’illusion qu’ils sont venus voir Genesis."

C’est aussi ce qui fait que The Musical Box est le seul groupe hommage sur la planète qui est endossé par les membres de Genesis, avec qui la formation québécoise collabore directement depuis plusieurs années. "On a eu la chance d’interviewer Mike Rutherford et Tony Banks pour nous aider à monter le spectacle. Ils ont toujours été très gentils et coopératifs. J’imagine que c’est flatteur pour eux qu’on ait décidé d’aller dans la période de Genesis qui a été la plus longue dans leur carrière, avec Phil Collins comme chanteur."

Enfin, soulignons qu’il est en quelque sorte logique que ce soient des Québécois qui fassent ainsi revivre Genesis sur scène. "Tout le monde sait qu’il y a un lien privilégié entre Genesis et le Québec. Avant même que ça fonctionne en Angleterre, c’était déjà assez gros ici. C’est vrai pour la plupart des groupes de progressif de ces années-là. Je parlais avec des membres de Gentle Giant un jour, je leur ai demandé ce dont ils se souvenaient du Québec, et ils m’ont répondu: "Des salles pleines!""

À écouter si vous aimez /
Genesis, Phil Collins, le rock progressif