Tomás Jensen : Overground
Dix ans de carrière, six albums et un prix consécration aux Canadian Music Awards plus tard, Tomás Jensen n’a rien perdu de son goût pour la fête et le rock.
Tomás Jensen bâille au téléphone. On le sort du lit: "Pour être capable d’écrire des chansons, on est obligé de relaxer", expliquera-t-il plus tard, sérieux. Relax mais occupé, le chanteur n’a pas chômé depuis la sortie de son album Quelqu’un d’autre, en 2008. Un album bien reçu par la critique, qui y a vu un point tournant dans la carrière de l’auteur-compositeur. La consécration (tardive) pour un trublion jusqu’alors un peu trop cantonné à l’étiquette d’altermondialiste festif.
Dix ans que Tomás Jensen roule sa bosse sur les sentiers du Québec, où il s’est amarré en 1998. De ces années, six albums, en solo ou avec ses Faux-Monnayeurs, et immédiatement, une empreinte singulière faite de rythmes festifs, de textes manifestes et d’un melting-pot culturel. Ses prises de positions, l’emploi de l’espagnol, du portugais ou de l’arabe dans ses chansons et son plaisir évident à brûler les planches ont eu tôt fait de lui valoir de flatteuses comparaisons. Manu Chao et Zebda, bien sûr, mais aussi Arthur H, Jean Leloup et Jérôme Minière. Rien de moins.
Ça le fait rire, Tomás, les comparaisons. "En fait, on devrait me comparer à Caetano Veloso, un chanteur brésilien extraordinaire, ou Bersuit Vergarabat, groupe de rock très populaire en Argentine. Mais bon, voyez, ça ne vous dit rien, alors pourquoi pas Manu Chao." Pragmatique.
Manu Chao, tiens, justement, qui pourrait bien produire un jour un album de Tomás. En 2006, Les Faux-Monnayeurs rencontrent Yvo Abadi, le batteur d’Amadou et Mariam et de Tarmac, également collaborateur de Chao. Ils travaillent ensemble sur un projet de disque "électro-rock latin un peu punk". La collaboration s’étendra sur deux ans, à distance. "On a enregistré une maquette mais on est toujours à la recherche d’un producteur." Manu Chao alors, pourquoi pas, ou bien le groupe Tryo, des amis de longue date. Mais on optera plus probablement pour l’autoproduction.
"Je vais certainement reprendre le projet à mon compte, m’autoproduire et monter un band pour l’année qui s’en vient." Ultimement, une tournée sud-américaine. Tomás rêve de partir y présenter ses chansons en espagnol et en portugais. Un juste retour des choses pour cet enfant de la balle né en Argentine. Tomás aime ça "quand ça bouge", dans la vie comme sur scène, un leitmotiv que sa dernière tournée ne dément pas, et tant pis si on perd en cours de route un peu de l’esprit du disque.
"Au départ, on s’est pas mal cherché, on a commencé par faire quelque chose de similaire au disque, de léché, d’intimiste, mais on a fini par dévier. Le disque et la scène, ce sont deux choses différentes, et j’avais envie de retrouver une vraie énergie." Une fois cette liberté acquise, Tomás et ses musiciens ont pu reprendre des morceaux qui ne parvenaient pas à trouver leur place, avec de nouveaux arrangements. "On a rendu les morceaux lents plus dansants, et le show est finalement assez rock. Sur la lancée, on reprend aussi de vieux morceaux des Faux-Monnayeurs, mais on ne dira pas lesquels, il faut venir nous voir pour le savoir!"