Anne-Julie Caron : Frapper au coeur
Anne-Julie Caron s’offre un premier récital au Palais Montcalm. Un moment précieux qu’elle attendait avec impatience.
Lorsqu’elle nous parle du marimba, on sent une passion qui l’anime. Il faut la voir en concert pour comprendre cette passion, et tout le talent qui habite la jeune interprète. Debout, derrière cet instrument de musique imposant, elle a des gestes d’une précision à couper le souffle. Avec deux baguettes dans chaque main, on se demande comment elle peut faire preuve d’autant de dextérité et de grâce en même temps. Un spectacle pour les yeux.
Anne-Julie Caron s’est distinguée depuis sa sortie du Conservatoire en 2003. Avec cet instrument de percussion, dont les origines se situent en Afrique et qui est devenu un incontournable dans la musique folklorique sud-américaine, comme au Guatemala, elle a ensuite additionné les honneurs: le Prix d’Europe en 2004, un deuxième prix à l’International Marimba Competition de Linz, en Autriche, en 2006, et j’en passe.
"J’ai fait les concours parce qu’il fallait les faire, constate-t-elle en riant. J’ai beaucoup appris à travers tout ça. En même temps, je suis très contente que ce soit fait. C’est vraiment dur sur le système. Surtout les concours internationaux. Ça pouvait me prendre un mois pour m’en remettre tellement j’étais épuisée. C’est la même chose pour les musiciens qui font des auditions, j’imagine. Moi, il est arrivé une année où j’ai tout simplement décidé que je ne faisais plus de concours. J’ai constaté que c’était assez. Après, tu dois faire ton propre chemin."
Avec son premier album, intitulé La Rencontre (Atma), la marimbiste nous a offert un aperçu de ses coups de coeur, dont cette transcription de Letter from Home de Pat Metheny qu’elle a concoctée. Elle y a ajouté Astor Piazzolla, ainsi qu’une oeuvre du compositeur et guitariste brésilien Guillo Espel, qui voit en elle "l’une de ses marimbistes préférées au monde". Des choix qui contrastent et qui laissent poindre toute la richesse sonore de cet instrument qui est, pour elle, beaucoup plus qu’un simple outil de percussion.
"J’aime la musique contemporaine, on n’a pas toujours besoin d’entendre de jolies petites mélodies accessibles dans la vie. Mais, dans ce milieu, on dirait qu’on se limite à une dimension strictement "scientifique" de la musique", mentionne l’interprète qui, en ce moment, se passionne pour les pièces du pianiste jazz George Shearing.
"Ce qui est important pour moi, c’est de jouer pour les gens, ajoute-t-elle. Oui, je veux faire découvrir le répertoire de mon instrument, mais en même temps je veux être en contact avec un public. Celui de la musique contemporaine, lui, est tellement restreint. Je ne veux pas perdre de vue la mission que je me suis donnée au départ: émouvoir les auditeurs."
En compagnie du violoniste Mark Djokic, qui se joindra à elle au Palais Montcalm en deuxième partie du concert, elle nous fera découvrir, entre autres, plusieurs compositeurs japonais, dont Minoru Miki, Somei Satoh et Keiko Abe. Elle revisitera aussi Jean-Sébastien Bach avec une transcription d’une gigue extraite de la Suite pour violoncelle seul n° 6.
À écouter si vous aimez /
Uakti de Philip Glass, les marimbistes Keiko Abe et Nancy Zeltsman