Misses Satchmo : Pour l’amour de Louis
Depuis Saint-Élie-de-Caxton, Lysandre Champagne fait revivre la musique de Louis Armstrong et d’autres légendes du jazz avec son groupe Misses Satchmo.
S’il y a un groupe dans la région qui peut parvenir à faire aimer le jazz à une nouvelle génération, c’est bien Misses Satchmo. D’abord un duo formé des irrésistibles Lysandre Champagne (trompette et voix) et Maude Alain-Gendreau (piano), que sont venus complémenter les excellents Frédéric Pauze (contrebasse) et Marton Maderspach (batterie), Misses Satchmo dépoussière les "standards" du genre et les interprète avec un enthousiasme rafraîchissant.
On a ici clairement affaire à des musiciens qui ont du plaisir à jouer, comme en témoignent les sourires espiègles que Lysandre et Maude s’échangent sur scène. "Maude, c’est un genre de coup de foudre, confie Lysandre. Quand est venu le temps de monter le projet, je cherchais avec qui je pourrais faire ça. Quand j’ai finalement pensé à elle – on s’était croisées une ou deux fois -, je me suis dit: "C’est sûr que ça va marcher, c’est exactement la personne qu’il me faut." Et je ne me suis pas trompée!"
Les deux jeunes musiciennes ont commencé à jouer ensemble en mai 2008, et l’alignement actuel de Misses Satchmo en tant que quatuor est encore plus récent. "On est dans une belle période, on est comme en amour de s’être trouvés, poursuit Lysandre. Au Zénob, le 9 janvier dernier, c’était la première gig qu’on jouait tous ensemble depuis que Frédéric est embarqué dans le band. On sentait vraiment qu’on avait trouvé la chimie, le match parfait de tout le monde."
Complices et communicatifs, les membres de Misses Satchmo sont aussi distrayants à voir qu’à entendre, et les spectateurs ont tôt fait, eux aussi, de se laisser emporter par leur bonne humeur contagieuse. "On ne fait pas du jazz hermétique. Le but, c’est que le monde se lève et danse. On sert plus la chanson que les musiciens. Oui, il y a des solos, mais on ne s’éternise pas!"
LE SENS MÉLODIQUE
Après avoir étudié en musique au Cégep Marie-Victorin puis à l’Université de Montréal, Lysandre Champagne s’est rapidement fait une réputation enviable dans le milieu. Elle a notamment été repêchée par Marco Calliari, qu’elle accompagne depuis maintenant huit ans, et elle joue aussi régulièrement avec Hugo Fleury et au sein d’Antonio, l’ambitieux projet instrumental de David Brunet.
Il est toutefois évident que Misses Satchmo a une place spéciale dans le coeur de la chanteuse et trompettiste, qui voue une admiration sans bornes à Louis Armstrong, à qui sa formation a d’ailleurs emprunté le surnom de Satchmo. "Les mélodies de Louis sont tellement belles! Il ne s’en fait plus, on dirait. Dans la musique, on a perdu un peu ce sens mélodique là", estime Lysandre, qui aime aussi beaucoup les grandes dames du jazz vocal telles que Billie Holiday, Ella Fitzgerald et Nina Simone.
Reckless Blues, On the Sunny Side of the Street, Heebie Jeebies, Summertime, Hello Dolly, They Can’t Take That Away from Me et l’immortelle What a Wonderful World ne sont que quelques-unes des formidables chansons qui font partie du répertoire de Misses Satchmo, qui s’élargit constamment. "À chaque concert, on ajoute des tounes. C’est l’fun en spectacle de pouvoir te dire que si tu ne sens pas une toune, tu la sautes, t’en joues une autre. Plus t’en as, plus c’est facile d’adapter ton show."
"Le répertoire est immense, vu qu’on va de 1910 à 1960. Et le jazz a beaucoup évolué, entre le simple blues, que j’aime jouer aussi, et une pièce de Nina Simone comme Love Me or Leave Me, qui est plus complexe sur le plan des progressions harmoniques."
Saint-Élie-de-Caxton, le village où Lysandre habite avec son amoureux et leur fille, est bien loin de La Nouvelle-Orléans, mais la jeune femme ressent néanmoins une forte connexion avec les Noirs du sud des États-Unis, fascinée qu’elle est par leur musique, bien sûr, mais aussi par leur histoire. "Ça aide à comprendre d’où vient l’esprit de ces chansons-là et pourquoi c’est si fort, pourquoi ils chantent de même. Il y a comme une profondeur, une richesse que tu ne peux pas imiter."
Sans les imiter, donc, Misses Satchmo fait honneur à Louis Armstrong et à ses contemporains, offrant une charmante relecture de leurs compositions qui, à chaque concert, rallie de plus en plus d’adeptes. "Ça ne fait pas longtemps qu’on existe, mais on a une belle synergie, et une bonne nouvelle n’attend pas l’autre en ce moment. Tout le monde est super réceptif chaque fois qu’on fait un spectacle; je sens qu’on a quelque chose… On a de bonnes fondations pour travailler", conclut Lysandre.
À écouter si vous aimez /
Louis Armstrong, Nina Simone, Ella Fitzgerald