Bïa et Yves Desrosiers : Dans une bulle
Après avoir entrepris plusieurs tournées en quintette, enregistré cinq albums et écrit un livre, Bïa n’a qu’une seule envie, celle de chanter. Elle se fait plaisir en présentant un concert intime en duo avec Yves Desrosiers, son complice de toujours…
"Je voulais recréer sur scène cette grande intimité où l’on est comme dans une bulle, installés confortablement sur un sofa entre amis avec un verre à la main et où on laisse celui qui chante nous emmener au coeur de son univers affectif", résume Bïa en parlant de ce vieux rêve qu’elle avait de proposer un spectacle en duo. Sa collaboration avec l’auteur-compositeur-interprète Yves Desrosiers ne date pas d’hier. Ils se sont rencontrés pour la première fois il y a dix ans, lors d’un des premiers passages au Québec de Bïa, qui habitait en France à l’époque. Les deux complices se sont retrouvés autour d’une bouteille de cognac et d’une boîte de cigarillos dans les coulisses du Petit Champlain où Bïa assurait la première partie de Ricet Barrier. Plusieurs heures de conversation sur la musique et la vie aboutirent à cette amitié qui dure encore aujourd’hui, alors qu’ils sont copropriétaires d’un duplex sur le Plateau.
Mélodies langoureuses
Cette complicité amicale et musicale est bien palpable sur scène. "En plus d’être un virtuose, Yves a une personnalité scénique incroyable. Il est extrêmement à l’écoute", soutient la Brésilienne d’origine. Il faut l’être lorsqu’on joue aux côtés de la Bïa qui, dans un élan de spontanéité, peut décider d’interpréter une pièce qui n’était pas prévue au programme. "Lors du tout premier spectacle de la tournée, je n’ai pu m’empêcher de chanter spontanément une pièce à laquelle je pensais, Palabras de Amor. Je n’ai pas chanté seule bien longtemps, Yves a réussi à me suivre très rapidement", raconte la chanteuse en riant. Elle prévoit d’ailleurs incorporer de nouvelles pièces à chaque représentation. Ce nouveau spectacle est à des lieues de celui qui était tiré de Nocturno, où les rythmes de la samba résonnaient haut et fort. Cette fois-ci, on a droit à de belles mélodies langoureuses, à des chansons en français et en portugais, mais majoritairement à des titres en espagnol qui lui rappellent son enfance passée dans différents pays d’Amérique du Sud. Côté musique, elle a épuré le tout: elle joue de la guitare et son acolyte manie la guitare et la slide.
Partager la scène a quelque chose de profondément réconfortant pour Bïa qui tire beaucoup de force de ses compagnons. Avant chaque représentation, elle tient à se retrouver entourée des gens qui font partie de son équipe. "Je dois sentir que ceux qui vont partager ce risque de monter sur scène avec moi sont dans le même état d’esprit que moi, qu’ils ressentent ces frissons qui parcourent la peau avant un spectacle", explique-t-elle. Mais pas question de lui faire la conversation: "J’ai besoin de me concentrer pour créer la magie. Le public est venu se faire envoûter et moi je dois être en transe." On comprend la grande admiration de Bïa pour ses musiciens lorsqu’on lui demande quelles rencontres musicales l’ont particulièrement marquée et qu’elle nous dresse alors la liste des artistes avec qui elle travaille sur une base régulière. Yves et elle rendent justement un court hommage à leur amie Lhasa De Sela durant le spectacle. Bïa y présente Los Hermanos, une chanson qui évoque la mort d’un proche, interprétée à maintes reprises aux côtés de Lhasa.
L’instant présent
Bïa a 15 ans de carrière, mais elle ne s’en soucie pas. Ce qui importe, dit-elle, c’est le présent. "Je prends les choses projet par projet, désir par désir et frustration par frustration, et j’avance. C’était vraiment le temps pour moi de faire ce genre de projet, de me laisser aller à mes coups de coeur", ajoute-t-elle. Pour l’avenir, elle souhaite qu’un album live prenne vie à partir de cette tournée en duo qu’elle désire prolonger après les 20 salles déjà au programme. L’automne prochain, elle repartira donner une série de spectacles dans l’une de ses nombreuses terres d’accueil, la France. Elle espère trouver le temps de se remettre à l’écriture de son deuxième roman, déjà entamé. Pas de nouvelles compositions à l’horizon pour l’instant. "Je suis plutôt inspirée par la prose ces temps-ci. C’est le bonheur d’être interprète, tu peux également chanter les chansons des autres avec autant de coeur que les tiennes", conclut-elle.