Agnès Jaoui : La nostalgie du soleil
Musique

Agnès Jaoui : La nostalgie du soleil

Dans la foulée de la sortie de son album Dans mon pays, Agnès Jaoui et son quintette officiel viennent partager avec nous leurs musiques solaires à l’occasion de Montréal en lumière.

"Oh, je fais de la musique avec des copains depuis longtemps, mais je n’avais jamais senti le besoin de rendre ça public", m’avoue candidement Agnès Jaoui que je connaissais seulement comme comédienne au théâtre et au cinéma, comme scénariste et réalisatrice, et qui a rejoint la cohorte des actrices qui tâtent de la chanson. Tout a commencé avec la parution en 2006 de Canta, ce premier disque chanté exclusivement en espagnol et en portugais, qui lui a valu un trophée aux Victoires de la musique dans la catégorie "musiques du monde". Quant à son parti pris pour des genres (fado, flamenco, boléro, bossa-nova, etc.) en apparence exotiques de la part d’une Parisienne, même d’origine tunisienne, qui par surcroît a fréquenté le Conservatoire à l’adolescence, Jaoui l’explique avec ironie par "une sorte de nostalgie du soleil de son pays natal".

Malgré son titre, Dans mon pays privilégie, comme le précédent opus, les musiques latines et les langues de Cervantès et Pessoa, sauf pour deux titres en français, dont la pièce éponyme. Quand je lui demande ce qui, selon elle, distingue le plus ses deux albums, Jaoui hésite. "D’abord, ma voix qui est un peu plus grave, plus assurée sur celui-ci, finit-elle par dire, blaguant sur les effets de la cigarette et de l’alcool. Et puis, il y a aussi la complicité avec mes musiciens, qui est plus forte, il me semble." En effet, à en juger par les bribes de conversations et les éclats de rire qui ouvrent ou concluent certaines plages de l’album, il régnait en studio une atmosphère de franche camaraderie entre la chanteuse et le violoncelliste et directeur artistique Vincent Segal, le guitariste Roberto Gonzalez Hurtado, le contrebassiste Eric Chalan et le percussionniste Maurice Manancourt.

Quant à ce pays qui "n’est pas géographie" esquissé dans la chanson-titre, il ne faut justement pas y voir de référence à une contrée en particulier. "J’ai beaucoup voyagé, j’évoque le meilleur, le plus beau de ce que j’ai vu un peu partout à travers le monde, en Espagne, en Irlande, en Amérique latine." Cette "ode à la beauté du monde" n’en est pas moins tempérée par une lucide tristesse, une certaine révolte envers les injustices et exactions commises un peu partout sur la planète, y compris en Occident, et contre lesquelles Agnès Jaoui n’a pas hésité à prendre la parole dans le passé. "Chacun fait selon sa conscience", dit-elle quand je souligne son engagement dans la cause des sans-papiers et celle des intermittents du spectacle en France. "Moi, je suis une privilégiée qui vit dans un quartier de privilégiés, mais je reste sensible au sort de ceux qui n’ont pas la même chance."

Que les admirateurs d’Agnès Jaoui, la comédienne, scénariste et réalisatrice, oublient leurs inquiétudes: en dépit du succès qu’elle remporte sur la scène musicale, elle n’a pas l’intention d’abandonner ses autres vocations. "C’est vraiment une démarche complémentaire. Je ne renonce à rien, je commence déjà à travailler sur d’autres projets." Nous voilà rassurés.

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