Simon Boccanegra : Belle découverte
Musique

Simon Boccanegra : Belle découverte

L’Opéra de Montréal présente ces jours-ci Simon Boccanegra, un opéra méconnu de Verdi. Avec la distribution réunie, l’amateur aurait tort de s’en passer.

Dans le catalogue de Giuseppe Verdi, l’opéra Simon Boccanegra passe plutôt inaperçu aux côtés de La Traviata ou d’Aida, et il n’a pas beaucoup de succès auprès des programmateurs. On croit comprendre pourquoi quand on traverse l’interminable prologue et le premier tableau du premier acte, d’un ennui consommé. Le livret quelque peu emberlificoté, qu’on ne tentera pas de résumer ici, oblige une mise en place de l’histoire qui est bien longue, et le metteur en scène David Gately ne peut trouver là aucune matière à animer. C’est très long. Ce n’est qu’au second tableau du premier acte, avec l’arrivée du choeur, que le spectacle commence; il était temps, mais la suite récompense la patience du spectateur.

Les cinq rôles principaux sont distribués avec brio et à partir du deuxième acte, les chanteurs ont enfin l’occasion de nous montrer ce qu’ils savent faire. C’est d’abord le tour du baryton Daniel Sutin, qui campe un Paolo scélérat à souhait, puis celui de la basse Burak Bilgili (Fiesco), à la voix d’une profondeur abyssale; enfin, le deuxième acte, c’est celui de l’air de Gabriele Adorno "Sento avvampar nell’anima", que le ténor Roberto de Biasio nous offre avec une aisance stupéfiante et un talent saisissant.

Dans ce concert de voix masculines, l’arrivée de la soprano Hiromi Omura, magnifique sur tous les plans, souffle une plus qu’agréable fraîcheur. C’est à Montréal qu’elle aura joué ce rôle pour la première fois, et on lui demandera sans doute de le reprendre ailleurs; ça la changera de Butterfly! Reste le personnage principal, Simon, que le baryton italien Alberto Gazale joue avec tout l’aplomb et toute l’humanité que requiert le rôle, projetant une voix impressionnante jusqu’à son dernier souffle (la scène de sa mort, sur laquelle se termine l’oeuvre, est d’ailleurs l’une des plus réussies).

Keri-Lynn Wilson (que nous faisions naître aux États-Unis il y a deux semaines, mais qui est en fait originaire de Winnipeg) dirige l’Orchestre Métropolitain avec finesse dans une partition qui n’est pas sans difficultés. Bref, malgré un début assez lent, la soirée vaut certainement le détour, et un coup de chapeau à l’Opéra de Montréal pour la découverte.