Xavier Caféïne : Le loup solitaire
Musique

Xavier Caféïne : Le loup solitaire

Xavier Caféïne se fait guerrier et met à l’épreuve ses propres principes. Au terme d’une remise en question, l’esprit tranquille mais attentif aux travers d’une collectivité qu’il aime provoquer, il est prêt pour le champ de bataille.

Gisèle est un sommet dans la carrière de Xavier Caféïne. Le portrait idéal du potentiel de cet auteur-compositeur-interprète qui a frappé dans le mille avec des hits comme Montréal (Cette ville) et La Fin du monde. Cette dernière chanson, au slogan accrocheur, a même voyagé en Europe l’année dernière. "La Fin du monde a joué en boucle à la radio à Berlin, crois-le ou non", se surprend encore Xavier Caféïne, qui tente de revenir sur les trois années qui se sont écoulées depuis la sortie de l’album en question, en 2006.

"On a fait plus de 200 shows pour Gisèle, précise-t-il. Ça a pris un an avant de décoller comme il faut. Environ 10 mois après sa sortie, il y a eu mon passage à Tout le monde en parle. Et soudainement, tu vois ton show se "booker" en malade. C’est pour ça qu’il s’est écoulé trois ans au lieu de deux pour sortir Bushido, mon nouveau disque. Sans compter qu’au travers de tout ça, j’ai réalisé l’album de Plastic Bertrand…"

LA QUÊTE

Ne cherchez pas, à l’écoute de Bushido, la suite concrète d’une formule éprouvée. Le chanteur au look caractéristique ne donne pas dans la recette. Sans hésiter, il tranche la question des attentes et de la performance commerciale. "Je ne me laisse pas vivre ce genre de pression. Le côté business, ce n’est pas à moi de m’en faire avec ça. J’ai une autre mission. Je ne suis pas ici pour être une vedette. Je suis seulement ici pour être un auteur-compositeur et je veux que les gens me reconnaissent pour mon audace. Il y a une prose, de l’imagerie dans mon travail. C’est politique et surtout philosophique. Caféïne, c’est un personnage aussi, c’est un héros de bande dessinée sans les super-pouvoirs."

Pour compléter ce cinquième disque en carrière (en comptant ceux des groupes Caféïne et Poxy), l’artiste s’est accordé un moment de répit. Le samouraï punk de la scène québécoise s’est retraité dans ses quartiers pour méditer adéquatement. Coupé de toute distraction, le mauvais garçon de la pop s’est longuement penché sur ce qu’il considère comme la colonne vertébrale d’une chanson: le texte. "Pour écrire, il faut être une éponge. Moi, je vois un artiste comme une personne sensible, beaucoup plus que les autres. Tout nous affecte. Il faut que tu transcendes quelque chose. Tu exorcises toutes ces affaires qui s’accumulent dans ta tête. Tu les reconstruis à ta façon, tu les domptes. Souvent, ce sont les choses laides qui t’interpellent et tu essaies de trouver le moyen d’en faire quelque chose de beau. C’est souvent le cas dans les arts visuels ou même en arts martiaux. Dans les arts martiaux, tu apprends à te psychanalyser, à analyser, à te conditionner, c’est très philosophique. Faire un disque, c’est pathologique dans mon cas."

Sous couvert de mélodies bien fignolées, dans un cadre rock et punk toujours aussi bien assumé, Xavier Caféïne célèbre à sa façon une soif de vivre empreinte de lucidité. Voir les choses telles qu’elles sont, sans se compter d’histoires, tout en se regardant en face. Une vision où les contrastes se fréquentent. Il constate avec La vie est belle ce qui ne changera jamais et son rôle futile devant les événements, pour chanter ensuite Vive la mort afin de se faire une raison. Il conclut même, comme pour y mettre le point final, avec une reprise du groupe allemand La Düsseldorf: Viva.

"Vive la mort, c’est une ode à la vie, précise-t-il. Je tiens à le spécifier tout le temps. C’est un titre dangereux. Je ne voudrais surtout pas être accusé d’encourager le suicide. C’est peut-être le seul point, le seul aspect de ce disque où je me suis résigné à penser aux autres. Je me disais: "Vive la mort… Shit! OK, je le chante, mais comment j’appelle cette chanson?" Elle a failli s’appeler Bushido. La "voie du guerrier", en quelque sorte. Mais j’y chante aussi Viva la muerte, ce slogan des fascistes espagnols. C’est radical. Il faut que tu trouves le moyen de te réapproprier ces termes. Pour moi, ça veut dire que tu fonces dans la vie, tête première. Autrement dit, oui, il y a des dangers. Par exemple, c’est dangereux de faire de la motocyclette. Mais sacrement! Quand tu en fais, tu es quasiment en train de voler! Veux-tu voler ou bien tu veux stagner là? Si tu veux stagner, il ne se passera rien et tu vas regarder Virginie. Si tu fais de la moto, tu peux mourir. Probablement que non, mais il y a une chance. Ben moi, je veux faire de la moto. J’ai juste une Vespa et je capote. À 70 km/h sur un chemin de campagne, c’est cool!"

À écouter si vous aimez /
The Clash, Dead Kennedys et La Düsseldorf