Galant, tu perds son temps : Drôles de dames
Musique

Galant, tu perds son temps : Drôles de dames

Les filles de Galant, tu perds ton temps dévoilent un côté de la musique trad que l’on connaît moins… Entre concours de poitrines et histoires sordides, le crachoir va aux dames.

Dans le florissant monde de la musique trad, les cinq gentes damoiselles de la formation Galant, tu perds ton temps se distinguent de leurs confrères par une approche inusitée du répertoire. Mis à part le Galant-accompagnateur qui s’occupe des rythmes, elles y vont a cappella, ce qui ramène le texte à l’avant-plan. En prêtant l’oreille aux cinq voix bien distinctes, on découvre que le point de vue à partir duquel les chansons sont livrées est féminin. "Il y a autant de chansons de femmes que d’hommes, révèle Josianne Hébert. Souvent elles sont entonnées par des hommes et on s’en rend à peine compte si on ne prête pas attention au texte. On ne peut pas être sûr à 100 % qu’elles ont été signées par des femmes parce qu’elles ont voyagé jusqu’à nous par tradition orale, mais on peut procéder à des déductions."

En effet, les textes sont souvent déballés à partir de la première personne; on est ici dans une écriture de l’intime. Les "chansons d’hommes" visent davantage à divertir. "Ils écrivent aussi des complaintes, mais le contexte d’écriture diffère. C’est l’homme au chantier qui s’ennuie, ou qui doit partir à la guerre, loin de sa bien-aimée. Ils parlent de catastrophes historiques, d’accidents de travail, tandis que l’imaginaire féminin est ancré dans le quotidien, dans la maison. La femme est celle qui reste et attend… Deux univers complètement différents", précise la musicienne que l’on peut aussi apercevoir sur scène aux côtés de Pierre Lapointe.

Initiée à la chanson traditionnelle par sa grand-mère, qui a eu la bonne idée de retranscrire toutes les chansons qu’elle connaissait dans un cahier, Josianne Hébert s’est intéressée récemment au côté sombre de la chanson trad. Cela explique en partie pourquoi le second album de la troupe (Galant, tu perds ton temps II, La Tribu), lancé l’an dernier, est double. Un recueil de chansons rythmées, plus légères au plan des textes, suivi d’un alignement de complaintes qui n’ont rien de bien festif. "J’ai été attirée par leur côté sombre. Il y a des histoires très trash dans le répertoire, souligne celle qui assure aussi le rôle de directrice musicale du projet. Pour moi, les complaintes ont la même valeur que les chansons populaires. Elles ont un aspect très actuel, et ça vaut la peine de sortir du "swingue la bacaisse" une fois de temps en temps."

Les textes, si joliment mis de l’avant par les voix harmonisées des dames galantes, sont imagés. On maîtrise l’art de la finale punchée et ici, la métaphore est reine. "Ça me fascine de voir toutes les pirouettes effectuées pour éviter de dire les choses au premier degré! À force de relire le texte de La plus jolie des filles, j’ai fini par comprendre qu’il s’agissait de l’histoire sordide d’un viol collectif et ça m’a fait réfléchir. Sans parler des expressions inventées pour éviter "tomber enceinte": se casser la jambe, avoir le jupon trop court… C’est fort, poétiquement."

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