Jónsi : Ceci n’est pas un volcan islandais
Avec son nouveau projet hors du clan Sigur Rós, Jónsi invite l’auditeur à s’engouffrer dans une forêt de bonsaïs.
Depuis que Sigur Rós est apparu dans le paysage musical, les journalistes dressent des liens entre la musique du groupe et la géographie incomparable de son Islande natale, pays de feu et de glace, de sables noirs, de ciels roses et de champs de lave figée: terre de contrastes, en d’autres mots.
Son album Ágætis byrjun (1999) demeure à ce jour la trame idéale pour accompagner les images d’Eyjafjöll, superstar malgré lui, dont les frasques font la manchette du téléjournal depuis quelques semaines. Go, l’album de Jónsi (chanteur-guitariste de Sigur Rós), est d’une autre fibre. Luxuriant, rempli de détails, il se déploie sur un territoire vaste, enchanté, moins polarisé par le post-rock. Bien sûr, qu’on pense à Sigur Rós – comme on pense aux Strokes à l’écoute du projet solo de Julian Casablancas. Les fans du groupe ne seront pas décontenancés. "C’est très satisfaisant pour moi de lancer cet album", dit Jónsi, attrapé au vol entre une gig à la radio et une autre au Late Late Show de Craig Ferguson, au lendemain du Festival de Coachella. "Quelques-unes de ces chansons datent d’il y a 10 ou 15 ans… Je suis heureux qu’elles puissent enfin vivre au grand jour. Dans le groupe, règle générale, on écrit ensemble. Ces chansons, je les avais composées seul dans mon appartement, comme ça, en appréciant justement le fait de pousser mes idées aussi loin que j’en avais envie, sans avoir à en discuter avec les autres membres… Donner libre cours à ce que j’avais en tête sans que rien ne brime mon élan, c’était l’idée." Par la suite, ce qui était d’abord un projet solo est devenu une affaire de groupe sur Go. "C’est comme si j’avais un nouveau band. Évidemment, les gars de Sigur Rós m’ont manqué; je joue avec eux depuis si longtemps… J’ai hâte de les retrouver pour composer de nouvelles chansons en leur compagnie." Pour le moment, les trois autres membres en sont à apprivoiser leur nouveau rôle de papa.
Jónsi en a profité pour essayer quelques affaires: alors qu’il chantait principalement en "hopelandic", une langue inventée qui s’apparente à l’islandais, le voici s’exprimant en anglais. "Ça m’est apparu comme un gros défi, même si mon amoureux (Alex Somers, musicien très impliqué sur l’album) est américain et qu’on parle anglais à la maison. Je ne l’avais jamais expérimenté de façon aussi approfondie. Avec l’anglais, on peut semer des images dans la tête des gens, alors que si je chante dans une langue que personne ne comprend, l’auditeur s’invente sa propre histoire. Les deux sont intéressants. Pour moi, c’est plus difficile de décrire des sentiments ou des émotions en étant aussi précis qu’en islandais. J’ai tendance, en anglais, à dépeindre quelque chose de plus global."
Comme on peut le voir sur le magnifique vidéo de Go Do, signé Arni & Kinski, où Jónsi apparaît en homme-oiseau complice des pigeons, le chanteur en a aussi profité pour explorer ce média autrement que par le passé: "Avec Sigur Rós, on n’avait pas l’habitude d’apparaître dans nos vidéos, ou si peu. Là je joue un rôle, je n’avais jamais vraiment fait ça avant."
En attendant la venue de Jónsi, pour vous mettre en appétit, allez visionner les quelques émissions de bouffe que son amoureux et lui (vimeo.com/Jónsialex) ont mises en ligne sur le Web. On les voit préparer des recettes crudivores (rien n’est cuit, les aliments n’ont pas subi de transformations). Au menu: pâté de noix de macadam au persil, tarte aux fraises crue, etc., recettes tirées de leur livre Good Heart Recipe Book. "On a fait ça pour le fun, on y reviendra peut-être", dit Jónsi avant de s’emballer lorsqu’on lui apprend qu’il existe à Montréal un restaurant de cuisine crudivore (Crudessence, sur Rachel). Rendez-vous au Métropolis pour le plat principal.
À voir si vous aimez /
Sigur Rós, Patrick Watson, Múm