Yoav : L’étranger
De New York à Pretoria, en passant par Copenhague, l’auteur-compositeur sud-africain Yoav fait la découverte d’une muse insoupçonnée: le pluriculturalisme. Sa guitare à l’épaule, il fait face à son passé.
Avec des ventes de plus de 200 000 exemplaires de son premier opus Charmed & Strange paru en 2008 et une armée de supporters via les différents réseaux sociaux tant au Canada qu’un peu partout à travers le monde, le chemin que prendra le nouveau gravé de Yoav Sadan, A Foolproof Escape Plan, ne peut se révéler que pavé de succès. Réalisé par le batteur américain Joey Woronker – reconnu pour son travail auprès de Thom Yorke, Beck et R.E.M. – , l’album mise une fois de plus sur le folk rythmique et minimaliste que le guitariste-chanteur a perfectionné depuis ses débuts en tentant d’extirper toutes les sonorités de sa précieuse six cordes. "J’ai toujours eu l’intention d’aborder l’écriture du deuxième album différemment, quitte à composer au piano, chose que je n’aurais pas osé entreprendre auparavant", affirme-t-il, conscient que le concept de la guitare multifonction pouvait atteindre ses limites créatives. "Je crois que, en tous points, ça a donné un résultat supérieur à Charmed & Strange. Ce dernier est le travail de toute une vie, tandis que A Foolproof… n’est le reflet que de deux événements majeurs: le succès professionnel et un échec amoureux. Oui, peut-être que l’un a causé l’autre, il reste que j’ai entrepris une démarche plus instinctive."
Né en Israël au tournant des années 80, puis élevé en Afrique du Sud, Yoav a rapidement pris conscience du climat social qui régnait autour de lui. "Je suis un enfant de l’Apartheid, un milieu de vie bizarre et injuste. J’étais très jeune. Et, du jour au lendemain, tout a été bouleversé. Avec Nelson Mandela à la présidence, nos cours d’histoire ont été révisés et il y avait dans les rues une sorte d’euphorie insaisissable", se rappelle celui qui, dès lors, portera les stigmates d’une enfance vécue dans l’intolérance et le rejet. Contrairement à son prédécesseur, A Foolproof Escape Plan témoigne davantage d’une réflexion quant à la place que le chanteur occupe en société. "Je me suis toujours perçu comme un étranger, même dans la musique. Après avoir grandi avec l’étiquette du jeune juif blanc pendant toutes ces années, la notion d’être différent ne me dérange plus. Greed, sur le nouvel album, est d’ailleurs la première chanson qui traite explicitement de mes racines", souligne le guitariste, qui ajoute avoir composé certaines des pièces de l’album en s’imposant des sessions d’écriture dans une foule d’endroits reclus, comme le désert des Mojaves en Californie. Chérissant son statut privilégié de "citoyen du monde" et ne voulant en aucun cas prendre racine à un endroit précis, Yoav soutient avec passion que cette connaissance multiculturelle lui permet d’utiliser un langage qui peut plus facilement seoir à quiconque. "En ce moment, l’Europe, l’Inde, l’Amérique du Sud et le Japon m’intéressent énormément. Par ces voyages, je tente de gagner une vision d’ensemble unique propre à ce que je suis. Il suffit pour moi de faire entendre la musique, et le reste se fera de lui-même", laisse-t-il planer en guise de conclusion.
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