b.e.t.a.l.o.v.e.r.s : Ici et maintenant
Avec ses concerts spontanés ou extérieurs, donnés en solo, à trois ou davantage, b.e.t.a.l.o.v.e.r.s se positionne comme le nouveau catalyseur de la scène locale. All you need is l.o.v.e.!
"By the way, on joue ce soir au Café The Singing Goat de la rue Galt avec des amis, un groupe d’Halifax", me lance Charles Lavoie, encore en sueur après une séance photo en hauteur, avec un manteau de fourrure en guise d’accessoire. Cette invitation, elle est typique du leader de b.e.t.a.l.o.v.e.r.s, car 1- son groupe prend un malin plaisir à organiser des concerts à l’improviste que ce soit dans un lieu exigu ou un parc, et 2- le réseau d’amis musiciens de Charles ne semble pas avoir de limites. "On a un format l’fun pour se déplacer, explique-t-il. S’il fait beau dehors, on lâche le local de pratique et on sort. Mais là, on travaille à adapter le show pour des salles, à bien faire sonner ça une fois branchés."
À la veille de sortir un premier EP intitulé Seashore Haunts, la formation folk psychédélique bénéficie d’un virulent bouche à oreille qui la consacre déjà comme "the next big thing" émanant des fertiles terres sherbrookoises. "C’est de la chance, tempère vainement Charles. Il y a du monde qui croit en moi, en nous. Je ne sais pas pourquoi. C’est être à la bonne place au bon moment."
COEUR DE L.O.V.E.R.
Au cours des dernières années, le b.e.t.a.l.o.v.e.r en chef a accumulé de sporadiques études (en guitare classique, histoire de la musique, électro-acoustique…), composé pour la danse contemporaine, en plus de participer à quelques projets musicaux. Celui qui se nommait Hoax Motel fut bref – "On avait un show de prévu avec Torngat au Café Presse, puis ça a fermé le jour qu’on devait jouer", raconte-t-il, amusé -, mais The Random Partition Occurs Through Nowhere en est un autre qui a fait sa marque. "J’ai aussi étudié en sociologie. Ça m’a amené l’an dernier à devenir directeur musical pour un théâtre d’intervention en milieu communautaire. L’idée de b.e.t.a.l.o.v.e.r.s s’est créée à travers ça, en travaillant à la composition de musique pour le théâtre." Voilà qui explique peut-être la propension scénique du groupe.
Une première version du projet a vu le jour à l’été 2009. "Ça s’appelait alors Vawla. On a participé au FRIMAT, le Festival de la relève indépendante musicale en Abitibi-Témiscamingue. On s’est promenés un petit peu, mais les arrangements ne faisaient pas mon affaire."
Mais le véritable début de b.e.t.a.l.o.v.e.r.s s’est fait en solo… au coin d’une rue (faut-il s’en surprendre?). "J’étais à Montréal. Je jouais dehors, pis y’a un gars qui commence à tourner autour de moi. Je finis la toune puis il me dit: "Heille… c’tu une composition originale?" Le gars voulait que je fasse la première partie d’un show qu’il organisait avec deux bands, Cougarettes et Random Recipe." Pas plus fou qu’un autre, Charles Lavoie accepta l’invitation et, tel un saut dans le vide, il interpréta ses compositions inachevées devant un public qui fut hautement attentif. Le musicien prit alors confiance en son projet. "J’ai pu voir que ces chansons marchaient dans un contexte intimiste." Voilà qui mettait un terme à la recherche d’identité.
"J’ai eu des propositions pour enregistrer à la suite de ce spectacle-là, nous glisse-t-il. Mais j’ai décidé de prendre mon temps, de revenir à Sherbrooke, de continuer à travailler là-dessus." Sage décision, car il a pu recourir aux services du contrebassiste Benoît Converset, originaire de la Suisse, et du banjoïste Jessie Ens, né en Saskatchewan. "En solo, je trouvais qu’il manquait quelque chose. J’avais déjà travaillé avec Benoît, pis j’ai rencontré Jessie par un ami commun, un musicien de la Colombie-Britannique. Moi, Benoît et Jessie, c’est le coeur, le noyau de b.e.t.a.l.o.v.e.r.s, mais je veux de plus en plus ouvrir ça à un format collectif."
B.E.T.A. POÉSIE
Avec les compositions de Lavoie comme matière première, le EP s’est élaboré à trois. "Mon idée, c’était de faire un démo. On a fait le travail de pré-prod dans un petit chalet transformé en studio." L’enregistrement s’est ensuite fait au studio The Pines avec David Bryant (Godspeed You! Black Emperor) – "Il avait une belle implication, de bonnes idées", se remémore Charles -, le mixage fut complété à Sherbrooke par Charles-Antoine Gosselin (Jake and the Leprechauns) et c’est Harris Newman, de Grey Market, qui a assuré le mastering (Arcade Fire, Thee Silver Mount Zion…). "Avec lui, ton son part gros de même et puis il sort gros comme ça." À vous d’imaginer les gestes qui accompagnent cette citation!
Sur Seashore Haunts, deux chansons forment un diptyque. "Ghost Whales, c’est le songe d’un suicide. On l’entend bien dans la toune. À un moment, ça tombe en mineur puis on chante en choeur: "I will lead you down where the drown fishes rain." Holyfox, c’est l’après, la réaction des autres."
Quant à Venetian Walls, le sujet est tout autre, mais tout aussi vaste. "Ça traite des choses, des objets perdus durant la guerre, au sens propre et au figuré. La pièce s’appelait Our Nations Walls. On la répétait et Jessie m’a demandé: "Qu’est-ce que tu dis? Venetian Walls?" Puis, c’est resté, j’ai décidé de l’appeler comme ça. Le nouveau titre m’a amené à finir la deuxième partie de la chanson. J’ai fait des recherches sur les murs vénitiens et j’ai trouvé des choses intéressantes."
Après un moment de silence, Charles poursuit: "Y’a beaucoup à dire sur mes pièces, mais en même temps, ça demeure de la poésie. Je me laisse aller." Et à la fameuse question "Pourquoi chanter en anglais?", il répond ceci: "Ça me vient plus facilement. L’anglais est autour de moi depuis que je suis petit, comme pour pas mal de Québécois, même si on ne veut pas se l’admettre."
b.e.t.a.l.o.v.e.r.s
Seashore Haunts
(Indépendant)
À écouter si vous aimez /
Patrick Watson, Timber Timbre, Bowerbirds
LE OFF FESTIVAL DES HARMONIES
Encore une fois ce printemps, le Off Festival des harmonies prend d’assaut les restaurants et lieux publics de Sherbrooke en guise de prélude et d’accompagnement à l’événement principal, qui aura lieu du 20 au 23 mai sur le campus de l’Université de Sherbrooke. Ainsi, du 6 au 23 mai, une panoplie de formations musicales du coin serviront classique, jazz, folk et blues en échange d’une bonne écoute.
Outre celui des b.e.t.a.l.o.v.e.r.s, Voir Estrie vous conseille ces quelques concerts: pour le jazz, rendez-vous au Boquébière pour deux jam-sessions, le 7 mai avec Hot Jazz Quartet et le 14 mai avec Richard Savoie Quartet (à 21h30); pour le blues, on ne peut pas se tromper avec Greenwood, le 8 mai à 15h au marché de la Gare; pour le folk, optez pour le groove des Voyageurs Nus, également au marché de la Gare, le 15 mai à 15h; pour le classique, direction Da Toni pour le Duo Chartier-Liva, le 15 mai dès 19h.
Consultez l’extrêmement touffue programmation au SherbrookeEnMusique.com.