Nicolas Pellerin : Passeur de bonne humeur
Musique

Nicolas Pellerin : Passeur de bonne humeur

Bien qu’on le présente souvent comme le frère de l’autre, Nicolas Pellerin fait maintenant sa propre marque. Rencontre avec un violoneux "trippeux" qui redonne vie et modernité à la musique traditionnelle.

Il a été le sportif de la famille, puis le "bollé" admis en maths à l’université et rien, à première vue, n’aurait pu présager que Nicolas Pellerin ferait de la musique son métier. Pourtant, cachées dans le banc de piano de la maison de sa grand-mère, on peut retrouver de vieilles cassettes où l’on entend ses tout premiers balbutiements musicaux. "Ma grand-mère enregistrait tous les réveillons familiaux en cachette. Elle plaçait son enregistreuse derrière le piano autour duquel toute la famille finissait par se réunir et chanter. C’est sûrement là, dès l’âge de 2 ou 3 ans, que j’ai été initié à la bonne humeur que peuvent apporter les chansons à répondre", raconte Nicolas. Son père, qui était le deuxième meilleur "tapeux du pied" du village – le premier tapant les jambes croisées! -, lui a certainement transmis son talent. Évidemment inspiré par son frère Fred qui était chansonnier à l’époque, c’est à l’adolescence qu’il s’est mis à gratter de la guitare au son des disques de Richard Desjardins et de Raôul Duguay. "Je n’ai commencé à jouer du violon qu’à 19 ans! C’est à cette époque que j’ai laissé tomber mon bac en mathématiques pour m’adonner à ma vraie passion et faire un D.E.C. en musique traditionnelle à Joliette", explique le musicien.

Passionné marginal

"Lorsque j’étais plus jeune, on me percevait comme le campagnard marginal qui trippait sur le traditionnel. J’interprétais des chansons à répondre dans les spectacles de fin d’année pendant que les autres chantaient du Green Day ou du Bad Religion!" Aujourd’hui, toujours un peu en marge des autres musiciens trad, il crée avec son groupe Les Grands Hurleurs des arrangements musicaux très modernes. Sur scène, le trio utilise même un ordinateur duquel proviennent des séquences sonores qui viennent peaufiner l’ambiance de ses pièces.

Mais avant la musique, ce qui touche Nicolas Pellerin dans le répertoire traditionnel, ce sont les histoires racontées. "Il y a plusieurs chansons grivoises qui parlent de servantes et de curés, mais elles ne m’intéressent pas. J’aime les chansons d’amour, car elles demeurent actuelles", ajoute-t-il. Dans un de ses textes favoris, on peut lire: "Ah si l’amour prenait racine, dans mon jardin j’en planterais…" Revisiter la musique de nos ancêtres exige un grand travail de recherche. C’est une étape qui passionne Nicolas. Il fouille parmi les 42 bobines remplies de 911 chansons traditionnelles que lui et son frère ont reçues en cadeau, afin d’y dénicher ses coups de coeur. "Ce sont souvent des personnes âgées qui chantent et racontent leurs histoires. Elles ont de petits filets de voix fragiles et super touchantes. C’est ce qui me donne des frissons", confie-t-il.

Petit frère de…

Le musicien se voit comme un passeur qui contribue à ne pas faire oublier la musique de nos racines. Et selon lui, la magie opère, puisque ses salles se remplissent d’un public très varié: "Les vieux viennent nous voir pour se remémorer leurs bons moments, les jeunes adultes trouvent que ça groove et les mélomanes apprécient nos arrangements." Ailleurs dans le monde, la musique traditionnelle est considérée comme une "musique du monde". Nicolas a d’ailleurs déjà voyagé en Europe et aux États-Unis. Il y a, selon lui, un réel engouement pour la musique québécoise ailleurs dans le monde. On la considère comme quelque chose de très exotique. "J’adore faire découvrir notre musique à d’autres cultures. Dans le futur, j’aimerais faire plus de spectacles à l’international", ajoute-t-il.

Nicolas Pellerin a sorti en décembre son premier album solo accompagné de son groupe Les Grands Hurleurs. Cette sortie n’est survenue que quelque temps après celle de Silence, de son frère Fred Pellerin. Pourtant, le musicien n’y voit là aucune compétition fraternelle: "Pour moi, ce qu’on fait, c’est bien différent. La source est la même, on s’inspire tous les deux de la tradition orale, mais Fred fait de la chanson à textes et est conteur, tandis que je suis musicien", explique-t-il. Loin d’être jaloux, il est plutôt très fier de son grand frère. Les deux sont d’ailleurs très proches l’un de l’autre. Voisins et amis, ils se voient tous les jours dans leur village devenu mythique, Saint-Élie-de-Caxton!