Rafael Zaldivar : Garder le nord
Le pianiste Rafael Zaldivar est déjà reconnu comme la crème de la relève jazz au Québec. De Cuba à Montréal, le voici qui regarde le monde s’ouvrir devant lui.
Rafael Zaldivar vise haut, très haut! Après avoir remporté le concours du festival Jazz en rafale en 2009 à Montréal, le pianiste d’origine cubaine pense déjà à New York, l’une des plaques tournantes de la musique dans le monde. Avec la sortie de son premier album, Life Directions (Effendi), on se rend bien compte qu’il a le talent nécessaire pour s’exporter. L’interprète excelle dans Thelonious Monk, avec les pièces Four in One et Off Minor, et le compositeur s’expose avec virtuosité, en intégrant l’esthétique cubaine à une forme de jazz standard qui s’aventure dans la complexité rythmique et qui décortique l’harmonie. L’artiste a fait ses devoirs ces dernières années, et sa discipline a porté fruit.
Commençons par le dossier New York. Zaldivar a d’abord invité personnellement le batteur Francisco Mela – d’origine cubaine lui aussi – à venir jouer avec lui à Montréal. Et ses motivations étaient claires. Bien sûr, plusieurs paieraient cher pour avoir l’occasion de faire le "boeuf" avec Mela, mais ce musicien est aussi un régulier dans la formation Us Five du saxophoniste Joe Lovano.
"J’ai envoyé quelques compositions à Joe Lovano par courrier électronique. Il m’a répondu, en me disant qu’il trouvait ça très intéressant et que les choses semblaient bien aller pour moi à Montréal. Il m’a donné son adresse personnelle pour que je puisse lui envoyer encore plus de compositions. Joe Lovano a influencé tout le monde! Mon objectif, c’est de garder cette porte ouverte pour éventuellement m’intégrer dans l’un ou l’autre de ses projets à titre de pianiste. Pour l’instant, on en est là."
Nul doute que l’album de Zaldivar s’est ensuite retrouvé dans la boîte aux lettres du célèbre saxophoniste. Une première production pour ce jeune pianiste qui a vécu son "baptême du feu" en studio. "Je me suis retrouvé en face de moi-même sur le plan pianistique. C’était un véritable laboratoire. En spectacle, il y a une progression naturelle avec laquelle on compose. En studio, c’est le souci du détail qui compte. Des choses auxquelles tu n’aurais pas pensé se produisent, s’ajoutent. On apprend beaucoup sur le plan pianistique, on décortique. On a eu trois jours pour vraiment assimiler les arrangements, et pour s’évaluer aussi."
Avec ses complices Nicolas Bédard (bassiste) et Kevin Warren (batteur), le musicien de 27 ans a fait la synthèse de ses influences. Un exercice réfléchi qui marque une étape importante pour lui. "Thelonious Monk, Bud Powell, Art Tatum et Herbie Nichols… Je voulais aller puiser dans ce répertoire toute la richesse harmonique qui y est déployée et l’intégrer à mon propre langage. Ces artistes sont incontournables dans les mouvements be-bop et swing. Moi, je reste aussi connecté à mes racines et à la musique traditionnelle cubaine. Mais c’est un mouvement global. Toutes ces musiques se sont exprimées en parallèle. Pour commencer, c’était important d’emprunter ce chemin et de m’afficher tel que je suis, aujourd’hui."
À écouter si vous aimez /
Thelonious Monk, Chucho Valdés et Gonzalo Rubalcaba