Jacques Higelin : Champagne pour Higelin!
Jacques Higelin est de retour parmi nous avec un nouvel album, Coup de foudre, étincelant de chansons pop-rock et où sa légendaire démesure n’est jamais très loin.
Le père Higelin a plus de 40 ans de carrière. Déjà, en 1966, il endisquait des textes de Boris Vian, sous l’impulsion du producteur Jacques Canetti. Depuis, il a passé quelque temps chez Saravah, marginale et foisonnante étiquette musicale, à l’orée des années 70. On en retient quelques chansons sublimes: Six pieds en l’air, Remember, Je suis mort, qui, qui dit mieux?. Puis vint sa période rock, crise de la mi-trentaine qui se poursuit encore aujourd’hui: Est-ce que ma guitare est un fusil?, Rock in chair, Irradié. Sans oublier le double album culte de 1979 Champagne pour tout le monde / Caviar pour les autres. La suite, les années 80, sa collaboration avec Michel Pagliaro, tout ça, c’est plus frais en nos mémoires. Plusieurs Québécois, chanteurs ou non, se rappellent les spectacles d’Higelin en nos terres: interminables, dingues, hauts en couleur.
En 2010, cet homme n’a pas changé. Il est toujours aussi insaisissable, intarissable, pris dans ses pensées. Inutile au journaliste de préparer des questions, il suffit de tendre un micro à Higelin. Et c’est parti pour 40 minutes de monologue. Son nouvel album, Coup de foudre, a été enregistré en Alsace à la ferme de son ami et guitariste Rodolphe Burger. Au bout du fil, l’artiste plante le décor: "C’est un endroit tout à fait poétique, charmant. Il y a une aire de jeu jouissive, du bonheur, quoi. Du temps où Burger jouait avec son groupe Kat Onoma, il a installé un studio dans un immense grenier. La console de prise de son est dans la même pièce. Il n’y a pas de séparations entre les instruments. On a joué beaucoup en direct. Il y avait plein d’instruments de musique que Rodolphe a rapportés de différents voyages, en plus de ceux des autres musiciens. C’était un joyeux bordel, un grand foutoir." L’édition de luxe de l’album contient un livre avec photos et dessins qui brossent bien le climat bucolique des environs.
Propice à la création? Higelin s’est imprégné de l’ambiance pour y finir ses chansons. "En arrivant là-bas, toutes les musiques étaient composées mais pas toutes les paroles. Il me manquait quatre textes. J’ai vécu cette période très fort. En plus, quand on sortait de la ferme, c’étaient les Vosges, les montagnes." Le chanteur reprend sur ce disque Aujourd’hui la crise, une chanson tirée de Alertez les bébés! (1976): "C’est venu tout seul. On parlait beaucoup de la crise en France comme dans le monde entier. Un soir, je crois, j’ai joué ce morceau aux musiciens, et tout le monde s’est mis à l’apprendre. Ils aimaient comment il était construit. Et on a dit: bon, on le fait! Voilà. Mais j’aime beaucoup la version originale aussi. C’était déjà la crise à cette époque."
On s’étonne qu’Higelin, avec une aussi longue carrière, soit si peu repris par d’autres chanteurs. On peut citer ici Bïa avec Ballade pour un matin, Jeanne Cherhal avec la superbe La Rousse au chocolat ou Salif Keïta avec le succès Pars. Mais sinon, ses chansons sont trop marquées au sceau de sa forte personnalité: difficile de se les approprier. Entier, extravagant, unique dans le paysage français, Higelin est également une bête de scène que l’on n’a pas vue depuis longtemps ici: "La dernière fois, je crois que c’était pour les FrancoFolies, autour de 2000, par là… Cette fois-ci, on va jouer presque toutes les chansons de Coup de foudre, une ou deux du précédent Amor Doloroso, beaucoup de chansons rock, Pars que l’on fait en reggae, Je ne peux plus dire je t’aime…" Sentez-vous des frissons dans l’air?
Dans le cadre des FrancoFolies
À voir si vous aimez /
Indochine, Rodolphe Burger, Les Chiens