The Heavy : Sauvez leur âme
Pour sa seconde présence au Festival d’été, The Heavy est cette fois précédé par la rumeur favorable que provoque un des disques les plus séduisants du moment.
Référentielle au possible, se réclamant autant du rock garage que de la soul en passant par les BO de cinéma et le blues du Delta, la musique des Britanniques de The Heavy relève de l’exploit.
C’est qu’on ne fait pas se rencontrer les Sonics, Al Green et Ennio Morricone sans risquer, selon toute vraisemblance, d’obtenir une mixture indigeste. Et pourtant, tout semble à sa place sur The House That Dirt Built, second album du groupe qui, lorsqu’on l’a déposé dans le lecteur la première fois, n’a pas voulu en sortir avant des semaines.
"Si ça colle, je crois que c’est parce que nous sommes conscients qu’il faut respecter l’intégrité de toutes ces musiques, que certaines choses peuvent cohabiter avec d’autres, ou pas. Mais au-delà de ces considérations, il n’y a aucune règle. Si ça fonctionne, ça fonctionne. Si c’est bon, c’est bon", expose Kelvin Swaby, chanteur et cofondateur du groupe originaire de Noid, aux environs de Bath, en Angleterre.
Après un premier essai convaincant (Great Vengeance and Furious Fire) dont l’élan l’avait propulsée jusque chez nous l’an dernier, la bande à Swaby accouche d’une suite qui confirme le talent du groupe à piger dans l’histoire de la musique contemporaine pour fabriquer des recueils de chansons dont les genres se chevauchent, mais où dominent un esprit de liberté et un sentiment d’exaltation.
Sur la pièce Sixxxteen – qui résume peut-être le mieux le travail du groupe -, les musiciens chapardent sans scrupule la partition de I Put a Spell on You de Screamin Jay Hawkins, sur laquelle ils couchent une nouvelle mélodie, de nouveaux textes, avec pour résultat un morceau puissant, vicelard, dont on a envie de dire qu’il frise le génie. À croire, par moments, que si tout cela fonctionne aussi parfaitement, c’est plutôt parce que le groupe qui carbure aux légendes musicales a, comme Robert Johnson, pactisé avec le diable.
Quand on lui suggère l’idée, Swaby éclate de rire.
"Nous voulions que ce disque soit une sorte de voyage, mais le genre de périple au cours duquel on prend certains risques, tu vois? Plus qu’avec le précédent, nous avions le temps et les moyens pour y parvenir avec succès… Mais à bien y penser, nos spectacles sont si intenses, si forts, que cela ressemble parfois à une sorte d’exorcisme. Je n’ai pas fait de pacte avec le diable, mais peut-être sommes-nous possédés?"
À écouter si vous aimez /
The Herbaliser, Otis Redding, The Stooges