Wolf Parade : Le retour des Expos
Musique

Wolf Parade : Le retour des Expos

Sans chercher à créer de surprise ou de concert spécial dans un stationnement de banlieue, Wolf Parade profite aussi de l’été pour lancer son troisième album.

Tout comme "Expo 67" pour les Montréalais, l’expression "Expo 86" est entrée dans le langage populaire des habitants du grand Vancouver qui, sauf les 27 ans et moins, se souviennent encore aujourd’hui d’avoir franchi les tourniquets de l’Exposition universelle organisée dans la ville en 1986. Ce souvenir commun est à l’origine du titre donné au troisième album de la formation montréalaise Wolf Parade, dont les membres sont tous originaires de la Colombie-Britannique.

"Nous avons toujours eu de la difficulté à trouver nos titres d’album, explique le batteur Arlen Thompson. Ça finit souvent par être une inside joke que nous seuls comprenons. C’est comme ça qu’Expo 86 est ressorti. Je devais avoir 6 ou 7 ans à l’époque. Je me souviens d’y avoir vu une Rolls-Royce aux couleurs psychédéliques ayant appartenu à John Lennon, un bonhomme Lego géant et des montagnes russes qui m’étaient interdites parce que je n’avais pas la grandeur requise."

Si la pochette du disque – une photo d’époque où figurent trois cousins du guitariste Dante DeCaro armés de fusils en plastique – s’avère aussi une inside joke tout de même représentative de l’attitude scénique frondeuse de Wolf Parade, le contenu de l’album n’a rien d’une blague.

Deux ans après la parution du plus atmosphérique At Mount Zoomer, dont une année de hiatus qui a permis aux membres de se consacrer à leurs projets parallèles – Arlen Thompson a notamment travaillé à l’enregistrement des derniers disques de We Are Wolves, Omnikrom, Sunset Rubdown et Handsome Furs -, le quatuor montréalais lance un troisième album plus direct. Sans être aussi poignant que le premier Apologies to the Queen Mary, Expo 86 mise sur l’urgence et l’énergie des compositions de Spencer Krug et Dan Boeckner. La décharge est viscérale, emprunte aux années 80 pour ses sonorités de claviers, s’étire un peu trop à la mi-parcours (le CD fait 55 minutes), mais ramène Wolf Parade sur un terrain de jeu qu’il maîtrise: un rock sonique aux chants cathartiques.

En entrevue avec Pitchfork plus tôt cette année, Spencer Krug a avoué qu’il souhaitait produire un disque dansant. Il a d’ailleurs comparé Expo 86 à ces notes de musique griffonnées dans la bande dessinée Archie lorsque Betty, Veronica, Jughead ou l’autre, là, vous savez, le grand roux, se déhanchent au bal des finissants. "Lorsque nous nous sommes mis à travailler sur l’album, nous en sommes venus à la conclusion que nous étions un groupe rock… et que nous ne pouvions pas aller contre notre propre nature, confirme Arlen. L’arrivée de Dante au sein du groupe et le départ de Hadji Bakara (accepté pour compléter un doctorat en littérature anglaise à l’Université de Chicago) ont aussi changé l’ambiance en studio. Dante est responsable du premier vrai solo de guitare du répertoire de Wolf Parade (sur What Did My Lover Say?)."

Est-ce que cette approche plus instinctive est en réaction au plus alambiqué At Mount Zoomer? "Notre réflexion ne va pas jusque-là. Nous savions que Mount Zoomer n’était pas aussi accessible que Apologies. C’est difficile pour un groupe de produire son deuxième disque, particulièrement lorsque le premier obtient un succès critique. Dans notre cas, nous cherchions seulement à être créatifs. Nous avons pris beaucoup de temps à faire Zoomer et je crois que nous avons perdu le focus en cours de route. Cette fois, nous avons enregistré le disque rapidement à l’Hotel 2 Tango avec Howard Billerman. Nous étions bien heureux d’avoir un avis extérieur, parce que Zoomer avait été entièrement produit par le groupe."

Ironie du sort, la formation fait paraître Expo 86 au même moment où un autre groupe phare de la scène indé montréalaise s’apprête à lancer son troisième compact: Arcade Fire. Or, contrairement à la troupe de Win Butler, Wolf Parade n’a pas multiplié les annonces-surprises sur le Net ou les concerts événements pour mousser la sortie du disque. "Nous sommes trop paresseux pour créer ce genre de truc. Nous n’avons même pas de compte Twitter. Si nous donnons un concert-surprise, ce sera dans la cour d’un de nos amis pour son anniversaire."

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Arcade Fire, Modest Mouse, Franz Ferdinand