Le Hot Club de ma rue : Le gros club
Musique

Le Hot Club de ma rue : Le gros club

Le Hot Club de ma rue impose sa loi allègre de quadrilatère en quadrilatère. Discussion sur les enjeux manouches contemporains avec son leader, Martin Tremblay.

Oui, le nom du Hot Club de ma rue renvoie au Quintette du Hot Club de France du saint père de la musique manouche, Django Reinhardt. La formation ne constitue pas moins un hot club à proprement parler, un gros club, une équipe tout étoiles de la filière manouche-tzigane-swing québécoise: sa violoniste Josianne Laberge bastringuait jadis avec Polémil Bazar et son contrebassiste Mathieu Deschenaux propage l’héritage est-européen avec Gadji-Gadjo. Quant à Olivier Pépin, guitariste rythmique, on dira qu’il est le mouton noir, lui qui électro-rocke avec The Man Machine et exalte le mauvais goût avec Pedo Pedro.

Le capitaine, vétéran et guitariste soliste, Martin Tremblay, décrit la posture de son torride club par rapport à un genre qui compte son lot de puristes. "Deux visions se rencontrent. On est vraiment assez respectueux de la tradition à la base: on joue en formation quartette, on reprend beaucoup de trucs que Django a faits, etc. De plus en plus cependant, on commence à composer, mais toujours dans l’esprit manouche."

Un premier album paru en 2009, Songe d’automne, laisse entendre cette tension entre classicisme et douce profanation. Ainsi qu’un jeu de guitare très dégourdi. "C’est d’abord un grand défi d’avoir les deux mains en forme parce qu’il y a beaucoup de licks. C’est assez intense, très physique. Même l’accompagnement, qui peut paraître un peu plus facile, requiert beaucoup d’endurance. Olivier, au début, trouvait ça tough. C’en est un autre de sortir des patterns typiques de la musique manouche, d’avoir de la créativité, même si c’est sûr que le jeu est basé sur ce que Django a fait, très inspiré, peut-être trop inspiré."

Pause publicitaire: Tremblay fabrique lui-même des guitares dans la vie. Conseil de luthier: "Comme c’est assez compliqué de jouer correctement sans trop taper fort, d’avoir un son agréable, ça aide d’avoir le bon instrument. Quand tu as besoin de plus de volume sur une Les Paul, tu joues avec les amplis; là, tout se passe sur le plan du coup de "pic"."

Revenons à notre programme principal. Vous disiez que l’on pourrait aller communier à l’autel Django en manifestant un tantinet moins de déférence. Comment faire pour innover sans courroucer les dieux? "En essayant d’aller puiser nos idées ailleurs, en écoutant des guitaristes plus contemporains, au lieu de repiquer Django. Aujourd’hui, il y a tellement de trucs pas pertinents sur le marché. Plusieurs reprennent ses solos note pour note, c’est décevant. L’originalité, ça peut autant être d’avoir son son, son vocabulaire, que de faire des compositions."

Quant au plus gros phénomène manouche de l’histoire du showbizz québécois, les Lost Fingers, d’ex-puristes corrompus par les mélodies saccharinées des 80, Tremblay partage cette tranche de vie: "À cause d’eux, ma belle-mère savait c’était quoi de la musique manouche quand je lui ai donné mon disque."

À écouter si vous aimez /
Django Reinhardt, Biréli Lagrène, Sagapool