Claire Pelletier : L’exploratrice
L’envoûtante Claire Pelletier présente sur scène Six, un des dix meilleurs albums de l’an passé. Chansons planantes, foisonnantes, littéralement inouïes. Éclatante beauté.
En 30 ans de carrière, Claire Pelletier n’a jamais cessé d’explorer, pour le plus grand bonheur des mélomanes. Toujours en quête, elle creuse, elle innove. Qui, au Québec, métisse avec une telle maîtrise inspiration traditionnelle et sonorités modernes? À part peut-être Michel Faubert, on ne voit pas. En France, on pense à Gabriel Yacoub. La compositrice-interprète, voix pure, puissante et subtile, sait prendre aux tripes l’auditeur. Cinq disques que l’on hésite à qualifier de superbes, car le mot sublime existe aussi. Depuis 1996, elle a créé cinq albums torrides, à coller la chair de poule – et un opus de Noël, personne n’est parfait.
La dame entame une tournée québécoise pour mettre au monde Six sur scène, qu’elle a l’intention de jouer intégralement. À la bonne heure, car ces chansons se réécoutent avec un plaisir permanent et grandissant. Au téléphone, elle explique sa démarche, entre deux rires nerveux: "Dans la vie, on fait des choix. Je n’ai jamais voulu être dans les variétés. Pourtant, j’aime interpréter les titres des autres, dans mes spectacles, je faisais La Manikoutai de Vigneault. J’ai un peu de misère avec les étiquettes, je me faisais dire que j’étais la Monique Leyrac d’aujourd’hui, que je devrais faire les grandes chansons, les grands classiques."
On s’étrangle à l’idée que Claire Pelletier aurait pu n’être qu’une interprète de plus, répétant ce que les autres ont fait avant elle. Par chance, elle a pris un autre chemin: "C’est toujours le piège. Dès que tu es une bonne interprète, avec une belle voix, tu devrais chanter les chansons que les gens veulent entendre. Mais moi je résiste, je m’impose avec mes chansons. J’aime créer, c’est ce qui m’excite le plus dans le métier."
Ses disques, elle les fabrique depuis le début avec le musicien et compositeur Pierre Duchesne. Ensemble, ils élaborent ce son si riche et si particulier où la tradition côtoie de fines couches électroniques. Pour les textes, elle a demandé à Marc Chabot, collaborateur de Richard Séguin. Elle a emmené Chabot sur les lieux de son enfance, lui a raconté ses souvenirs, et c’est de ça que le parolier s’inspire pour écrire. À l’occasion, la compositrice-interprète retouche un peu le texte, chamboule un peu l’ordre des vers. Comme Pauline Julien l’avait fait avant elle avec des textes de Vian, Claire Pelletier s’approprie totalement les mots qu’elle chante.
"Pour le spectacle, j’ai engagé trois choristes, on a travaillé des arrangements de voix, on a écrit des partitions. J’aime explorer d’autres instrumentations. À part le nouvel album, il y aura quelques chansons incontournables comme Le Vaisseau fantôme, mais complètement réarrangées. Galileo, avec de la batterie, ça prend un tout autre groove. Le batteur Simon Blouin expérimente aussi. André Papanicolaou apporte des ambiances planantes de guitares un peu à la Radiohead." Il est temps désormais d’aller applaudir cette précieuse exploratrice.
À voir si vous aimez /
Radiohead, Loreena McKennitt, Michel Faubert