Pat Metheny : Pat et les robots
Musique

Pat Metheny : Pat et les robots

Chouchou des jazzophiles québécois, le guitariste Pat Metheny fait escale dans la capitale pour un concert en compagnie de son orchestre-robot.

"C’est un projet si absolument unique que je ne peux le comparer à rien d’autre", affirme d’emblée Patrick Bruce Metheny. "Ce qu’il représente est lié de manière organique à mes intérêts de toujours." Le moins qu’on puisse dire du protégé de Wes Montgomery, révélé en 1975 par son disque phare Bright Size Life, c’est qu’il ne fait rien comme les autres jazzmen! Inspiré par le concept des pianos mécaniques d’antan comme ceux qu’il a connus dans le sous-sol de ses grands-parents, le guitariste étoile à qui aucune expérimentation ne fait peur tourne actuellement avec un véritable orchestre d’instruments-robots contrôlés par les cordes de sa guitare.

En un sens, il n’hésite pas à le reconnaître, cet orchestrion prolonge l’expérience de New Chautauqua, son premier album enregistré littéralement seul en studio, il y a une trentaine d’années. Mais seul au milieu des machines, le jazzman ne s’ennuie-t-il pas de l’interaction humaine qui stimule l’improvisation? "Peut-être un peu, mais c’est vrai pour n’importe quel musicien qui se produit en solo", d’opiner le musicien natif du Missouri, royaume de l’Americana.

De son propre aveu, Pat Metheny n’a rien à faire des étiquettes, même s’il rejette d’emblée celle d’artiste de jazz fusion (un terme vide de sens, à ses oreilles) pour ne retenir que celle de jazzman. "Quand quelqu’un me demande quel type de musique je joue, je réponds: du jazz. La tradition du jazz exige, entre autres choses, un souci d’évolution et d’innovation. C’est un genre musical qui, à son plus haut niveau, rejette l’idée de la nostalgie et du rétro."

Si la musique conviviale et planante du Pat Metheny Group demeure la pierre angulaire de son oeuvre, le guitariste a néanmoins multiplié, au fil des 35 dernières années, des projets variés de nature plus audacieuse et expérimentale, dont le disque Song X avec le saxophoniste Ornette Coleman, éminence grise du free jazz, ou le radical Zero Tolerance for Silence. Et s’il s’est montré ouvertement critique de l’état du jazz ces dernières années, du commercialisme crasse qui afflige les productions de certaines têtes d’affiche (notamment le saxophoniste Kenny G, star de la muzak, qu’il avait descendu en flammes), Metheny écoute avec beaucoup d’enthousiasme ce qui se fait de mieux dans le genre. "Il est vrai que je préfère entendre quelqu’un exprimer une pensée originale et peut-être pas encore aboutie, plutôt qu’un musicien qui propose une synthèse nacrée de styles antérieurs qu’il tente de faire passer pour des trouvailles."

Conscient du traitement de faveur que lui ont toujours réservé les mélomanes d’ici, Metheny ne cache pas sa hâte de partager avec eux cette expérience digne d’un film de science-fiction. "C’est étrange parce que tous ceux qui y assistent pour la première fois sourient d’abord, jusqu’à ce qu’ils entendent affluer les notes. Et là ils se disent: c’est drôle, et pourtant il faut s’y arrêter parce que c’est de la musique sérieuse, radicale. Et pour moi, c’est une combinaison gagnante."

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