Bernard Adamus : Rose bonbon
Musique

Bernard Adamus : Rose bonbon

L’album de Bernard Adamus s’appelle peut-être Brun, il reste que le personnage n’a rien de drabe. Et sa carrière non plus.

On peut dire que ça va particulièrement bien pour Bernard Adamus depuis un an. Tel un aimant, celui qu’on compare à Plume Latraverse ne cesse de s’attirer les honneurs. En 2009, il a raflé 6 des 10 prix du Festival en chanson de Petite-Vallée, en plus de remporter le prix ÉCHO de la SOCAN pour La Question à 100 piasses. Récemment, il a ajouté à son tableau des médailles une première place aux Francouvertes et le Grand Prix de la relève Archambault 2010. Et c’est sans parler de ses deux nominations au prochain Gala de l’ADISQ (Album folk contemporain et Révélation de l’année) et de ses sept nominations au GAMIQ.

Nul doute que ce brillant parcours doit faire baver d’envie plusieurs artistes de la relève. Lui, s’habitue-t-il à autant de reconnaissance? "Il y a ma fille, avec son flair de Sherlock Holmes, qui, voyant que j’avais gagné pas mal de concours dernièrement, me proposait de m’inscrire au Festival international de la chanson de Granby. Mais je lui ai dit qu’il était un peu trop tard, lance-t-il à la blague. Écoute, je ne sais pas quoi te dire. Quand tu reçois un prix, ça dure 25 minutes, et après ça, la vie continue. Mais ça fait plaisir." Il reste que ça doit ouvrir certaines portes, non? "Il faudrait attendre une autre année, en fait, avant de pouvoir répondre à cette question, je pense. Ma face apparaît un peu plus dans les médias. Donc, j’ai un peu plus de diffusion. Avoir un label, gagner Petite-Vallée, ça, oui, ça ouvre des portes. Gagner le Grand Prix de la relève Archambault, ça fait vendre des disques. Mais est-ce que ça ouvre des portes? Je ne sais pas…"

Ce que l’auteur-compositeur-interprète sait, par contre, c’est que si un certain douanier ne lui avait pas refusé l’accès aux États-Unis en décembre 2008 – on se souviendra que c’est à la suite de cet épisode que le musicien, cassé, a écrit La Question à 100 piasses et a mis toutes ses énergies à développer sa carrière musicale -, il vendrait sans doute encore des sapins de Noël chez nos voisins américains. "Oui, je ferais encore ça. Car c’est la seule job que j’ai vraiment aimée dans ma vie. Et en plus, c’était super payant. J’ai adoré vendre des sapins. Je pourrais quasiment retourner faire ce travail. Mais bon, je n’y retournerai plus, parce qu’on m’interdit l’entrée aux États-Unis pour encore trois ans. Et dans trois ans, j’imagine que je vais être rendu ailleurs." S’il n’avait pas rencontré d’embûches et avait poursuivi dans cette voie, croit-il qu’il s’inscrirait dans le paysage musical québécois aujourd’hui? "Non, je ne pense pas. Ça a vraiment été l’élément déclencheur." Une pause, puis il se reprend: "Ben, peut-être. Je ne sais pas. Mais je ne me serais pas autant acharné."

GRIS-BRUN

En ce moment, le ciel professionnel d’Adamus semble sans nuages. Le Polonais d’origine admet cependant qu’il vivait des jours un peu plus gris au moment d’écrire l’album Brun (réédité l’an dernier par Grosse Boîte). "J’étais dans un état d’esprit à la fois lamentable et festif, un peu comme les paroles de l’album. Brun, c’est un disque assez sombre, en fait. Il est rendu festif et drôle parce que je n’aime pas vraiment m’apitoyer trop longtemps sur mon sort. Quoique, je l’avoue, je suis un grand chialeux."

"Brun, c’est la première chanson que j’ai faite. Ça a commencé par une farce. J’ai écrit "Brun, la couleur de l’amour" sur un bout de papier. Ça a fait rire le monde autour de la table et, quelques mois plus tard, j’avais une espèce de première toune, qui a fini par faire son petit bonhomme de chemin. C’est rendu qu’elle joue à CKOI, ça a l’air", souligne-t-il, avec un ton qui rappelle celui de l’indifférence. Ça ne te fait pas plaisir? "C’est sûr que ça me fait plaisir. C’est juste que je trouve ça étonnant comme destin de première chanson. Je commence à être conscient de ça. Je connais un paquet de monde qui écrit des tounes depuis un christie de bout de temps et qui a eu des bands au cégep et au secondaire. Moi, je n’ai jamais eu de band. Sauf un cover band de blues qui a duré un an, juste avant de faire ce projet en français." Comme sa musique se rapproche justement du blues, c’est curieux qu’il n’ait pas opté pour l’anglais, une langue qui colle davantage au genre. "J’ai chanté en anglais, oui. Mais m’exprimer en anglais, non. Ça ne m’est jamais passé par la tête. Ça ne faisait juste pas de sens de faire toute une vie en français, pis finalement, de pogner une feuille de papier et écrire en anglais", rétorque celui qui s’est mis à composer autour du début de la trentaine.

En spectacle, le projet donne quelque chose de tout à fait original. "Sur scène, c’est cinq "tobales" [Éric Villeneuve (batterie), Benoît Paradis (trombone), Sylvain Delisle (contrebasse), Tai Nguyen (banjo, guitare) et lui-même] qui travaillent sur le stage et un "motté" [Pat Legault] qui s’occupe du son. Ça donne une espèce de folk québécois bluesé, un peu trash, assez festif et humain à la fois!"

À voir si vous aimez /
Plume, Dany Placard