Dany Placard : Du placard à la shed
À l’image de son nouvel album plus rock, Dany Placard donnera deux concerts énergiques dans le cadre de Coup de coeur francophone.
Le changement d’ambiance frappe dès les premières mesures de Placard, la troisième production solo du bleuet Dany Placard. Non pas que le compositeur soit revenu au registre rock abrasif de son premier démo pré-Plywood 3/4, mais disons que le nouveau compact s’affranchit de l’ambiance introspective des excellents Rang de l’Église et Raccourci, deux disques profondément ancrés dans la noirceur et la mélancolie folk americana. Cette fois, la dégaine est rock, plus lumineuse et accessible.
"Assurer la réalisation de nombreux albums folk (Chantal Archambault, Domaine Alary, Caloon Saloon) m’a permis de m’accomplir dans le style et, par le fait même, m’a donné le goût de me diriger ailleurs, explique Dany Placard. À la limite, enregistrer le disque de Chantal Archambault m’a permis de sortir l’album folk qui sommeillait encore en moi. C’était ensuite facile de passer à autre chose."
Première pour Placard, plus de la moitié des titres du gravé ont été composés au piano, une nouveauté qui a forcé le chanteur à sortir de sa zone de confort. "J’avais joué beaucoup de piano au cégep, dans les années 90, et j’y suis revenu dernièrement, après qu’on m’ait donné un piano. Ça a changé bien des choses parce qu’à la guitare, j’ai de vieux réflexes. Mets-moi une guitare dans les mains et je te joue mécaniquement des vieux riffs de blues et de western. Tandis qu’au piano, j’ai pas la même approche, mes progressions d’accords sont différentes."
Si les musiques changent, les histoires restent. Habile narrateur, Dany Placard utilise les dix chansons du CD pour dresser le portrait de dix femmes au destin trouble. Des instantanés touchants, glauques. "J’ai toujours aimé inventer un personnage et lui créer une histoire sur mesure. C’est d’ailleurs le conseil que je donne aux musiciens qui cherchent l’inspiration pour écrire leurs textes: "Observe autour de toi, trouve un personnage fort et invente-lui une histoire." Je me vois plus comme un conteur, comme quelqu’un qui écrit des nouvelles."
Après 16 ans de carrière, l’auteur-compositeur-interprète avoue avoir trouvé l’équilibre qu’il recherchait depuis ses débuts, ce qui expliquerait l’état moins dépressif de l’album. Bien appuyé par l’étiquette de disques Indica, Dany Placard jouit aujourd’hui d’une stabilité enviable. Finis les chantiers de construction où l’homme se dirigeait tôt le matin pour pallier ses faibles revenus d’artiste. Vivre de sa passion est maintenant possible grâce à la régularité avec laquelle il lance ses albums et grâce à ses talents de réalisateur en demande. Pour une cohorte de nouveaux artistes folk, enregistrer dans la shed de Placard est devenu un objectif. Tire le coyote, Louis-Philippe Gingras et Francis Faubert sont les prochains en lice. "C’est un honneur pour moi de voir autant de jeunes musiciens me confier leur matériel, mais en même temps, je n’aime pas qu’on me qualifie de "figure de proue" du renouveau folk. Oui, je crois teinter les productions d’un son particulier en les salissant, en leur ajoutant de la distorsion, mais en même temps, je ne suis pas le premier à faire ça."
Reste que le compositeur s’est bâti une jolie scène autour de lui, et que les quelques acteurs invités à le rejoindre lors de ses deux concerts à Coup de coeur francophone ne se feront pas prier.
À voir si vous aimez /
Fred Fortin, Wilco, Mara Tremblay