Alexandre Désilets : Changement de garde
Musique

Alexandre Désilets : Changement de garde

Alexandre Désilets change d’air et revient avec un deuxième album plus rock. À mi-chemin entre Dumas et Daniel Bélanger, il fera peut-être danser les ondes radio.

Le premier extrait du nouveau Désilets, La Garde, s’appelle Changer d’air et, en effet, il nous emmène dans un style différent. Finie la pop planante et sensuelle d’Escalader l’ivresse. Le chanteur est conscient que certains risquent d’être déboussolés: "On ne fait pas des choses pour déplaire, mais dans les opérations qu’on fait, on ne peut pas plaire à tout le monde. Par exemple, dans une direction artistique. Sur un deuxième ou un troisième album, tu peux décider d’aller complètement ailleurs. Ça se peut que tu déplaises à certains fans finis, mais on se doit d’évoluer. On est dans une industrie qui change beaucoup, et vite. Il faut trouver les moyens de se virer de bord pour survivre."

Le jeune artiste au bout du fil s’avoue volontiers naïf et ne comprenait pas que sa chanson L’Éphémère, dont le clip a fait fureur sur YouTube, ne tourne pas plus dans les radios commerciales. Pour lui, c’était accessible, tout simplement. Une pop honorable dont il se réclame: Coldplay, The Beatles, de l’indie rock et du r’n’b, mais à part Radio Radio, zéro franco. "J’aime la pop. Ça ne me dérange pas d’aller vers ça, j’y vais de temps en temps. Je ne sais pas si c’est plus pop ou plus commercial, mais disons plus assumé. Et là, ça m’arrive d’avoir peur que ce soit trop pop, je fais un pas en arrière."

Alexandre Désilets accumule les succès critiques, les prix (Ma première Place des Arts, Petite-Vallée, Granby, Félix-Leclerc). "Est-ce que les prix font une différence? C’est difficile à dire. Je ne pense pas que ça change quoi que ce soit, sauf peut-être passer à Tout le monde en parle vu que c’est tellement grand public. Ce qui peut changer un peu, c’est l’accumulation de ces prix. Le prix Félix-Leclerc, c’est cool, car ceux qui votent, ce sont les critiques des journaux, des gens qui sont dans l’industrie depuis longtemps, les pairs auteurs-compositeurs. C’est hyper flatteur. Ça donne envie de continuer. Mais tu ne vendras pas pour autant plus de shows et ta chanson ne passera pas davantage dans les radios commerciales." Quant au fait qu’il ait raté le Félix de révélation de l’année en 2008, le mélomane ne peut que crier au scandale tant était puissant Escalader l’ivresse, singulier dans le paysage québécois.

Sa première galette s’est écoulée à quelque 10 000 exemplaires, ce qui, dans le contexte actuel de l’industrie, est beaucoup. Le changement de style que l’on constate sur La Garde a été amorcé par le dernier extrait d’Escalader l’ivresse, Où vent nous mène, qui a tourné pas mal en région et moins à Montréal, étrangement. Un morceau moins languissant, plus rythmé. Il a été ajouté en bonus de réédition du CD. Pour ceux qui avaient déjà la première version, il existe toujours le téléchargement, rappelle l’interprète…

Ça danse dans sa tête

"Pour le deuxième disque, je ne voulais pas être pris dans un concept trop rigide ni accumuler 56 chansons et ne garder que les meilleures. Cette fois-ci, je voulais commencer par les musiques; j’avais fait les arrangements chez moi, les maquettes. J’en avais une vingtaine. Puis j’ai commencé à travailler avec mon ami Mathieu Leclerc, avec qui j’ai écrit les textes dans un bloc de quatre mois. On pensait à une histoire, à un monde."

Lui qui avait écrit son premier opus presque seul, pourquoi s’est-il adjoint les services d’un auteur? "Je suis allé chercher Mathieu pour le plaisir de collaborer, pour aller plus vite, pour apprendre, pour aller ailleurs. On peut facilement se tanner de son propre univers; tu finis par tourner en rond."

À l’écoute du nouvel album, on peut se demander quels facteurs ont influencé ses récentes chansons, et si faire des spectacles peut modifier l’écriture. "C’est davantage sur le plan des sonorités que ça influe. Quand tu es sur scène, tu comprends assez rapidement ce qui passe ou non. C’est la même chose pour les mélodies: je ne les construis plus de la même façon. Pour les mots aussi. J’ai besoin de mots qui sonnent, qui me permettent de chanter et d’atteindre ma note", raconte celui qui compose ses musiques dans sa tête sans jouer réellement d’aucun instrument.

Pour La Garde, Désilets s’est entouré de la même équipe artistique, un noyau serré qui l’aide à garder le cap… ou à le changer, au besoin.

À écouter si vous aimez /
Dumas, Daniel Bélanger, Jérôme Minière