Stéphane Laforest / Orchestre symphonique de Sherbrooke : Vive la France!
Musique

Stéphane Laforest / Orchestre symphonique de Sherbrooke : Vive la France!

Stéphane Laforest et l’Orchestre symphonique de Sherbrooke s’attaquent à un programme 100 % français. Ravel, Bizet et autres… Du classique bleu-blanc-rouge, baguette sous le bras.

À 47 ans, Stéphane Laforest est un chef d’orchestre en demande. En plus d’être à la tête de l’Orchestre symphonique de Sherbrooke (OSS) depuis 1998, il officie à La Sinfonia de Lanaudière, un orchestre qu’il a fondé en 1994. Jusqu’en juin prochain, il est aussi premier chef assistant pour l’Orchestre symphonique de Montréal. Son emploi du temps ne s’arrête pas là, car on pense souvent à lui pour faire partie de prestigieux comités, pour élaborer des trames sonores de films ou même pour chapeauter la mutation symphonique du répertoire d’artistes pop. Ces nombreux chapeaux lui vont à ravir… le béret en est la preuve!

Occupé, le chef, mais visiblement comblé, car le public québécois répond à l’appel. "Depuis les 10 dernières années, je n’ai jamais vu autant de monde aux concerts", affirme-t-il, ravi. Même lorsqu’on lui souligne qu’un large pan de la jeune génération demeure récalcitrant au genre, Laforest reste inébranlable, confiant quant à l’avenir. Son argumentation part d’une implacable logique. "On va tous être vieux à un moment donné. Rendu à 50 ans, t’as moins le goût d’écouter du rock heavy. Les jeunes, on n’est pas obligés de leur faire aimer le classique; ils vont y arriver un jour."

Chose certaine, les Sherbrookois en sont venus à aimer leur orchestre. "Quand je suis arrivé, l’OSS était cliniquement mort. Il n’y avait presque pas de monde dans les salles. On a donc commencé à jouer tous les grands classiques. On a fait Mozart, Beethoven, La Symphonie du Nouveau Monde, les Canons de Pachelbel, la Petite Musique de nuit, Guillaume Tell, Casse-Noisette, etc. On les a tous faits… et ce fut très bon pour les musiciens. Tout orchestre qui se respecte doit avoir ça dans sa petite poche arrière." Selon sa vision, Laforest a fait les choix qui s’imposaient afin de ramener les mélomanes au bercail, tout en faisant progresser l’orchestre. "À mon arrivée, on disait que l’orchestre était semi-professionnel. Moi, je ne l’ai jamais traité en tant que semi. J’ai toujours été extrêmement exigeant. On est devenus un des meilleurs orchestres de région au Canada; c’est le Conseil des Arts du Canada qui l’a dit."

Au-delà de la qualité de ses programmes et de ses troupes, l’OSS a aussi su rallier les foules grâce aux qualités humaines de son chef, qui fait preuve d’humour et de pédagogie lorsqu’il s’adresse au public. "En concert, je présente toujours les oeuvres très sommairement. Ce n’est pas dans l’idée d’éduquer les gens, mais d’expliquer pourquoi telle pièce est jouée depuis 300 ans, pourquoi on dit de telle autre qu’elle est géniale… Et j’aime ça mettre un petit peu d’humour là-dedans", confirme celui qui, les soirs de match, aime bien glisser le pointage du Canadien entre deux pièces. La solidarité masculine a plusieurs visages.

Sans thème, mais avec coups sûrs

Contrairement aux années passées, la saison 2010-2011 de l’OSS ne comporte pas de thème. "Je n’en voyais pas l’utilité, explique Stéphane Laforest. Depuis trois, quatre ans, on visite des sentiers moins battus et je suis étonné de voir à quel point le public suit. Mais il y a toujours une pièce connue par programme, pour que tout le monde puisse s’identifier à au moins un morceau."

Le programme Vive la France! ne fera pas exception à cette nouvelle règle, d’autant plus qu’au dire du chef, les compositeurs de l’Hexagone savent se distinguer. "C’est un style différent, qu’on n’a pas fait beaucoup ici. Je pense entre autres à la musique impressionniste, avec Debussy et Ravel. C’est difficile; ce sont des couleurs, des sonorités, des ambiances… L’an passé, on a joué un Debussy qui s’appelait Printemps, et les gens ont beaucoup aimé. J’ai trouvé que l’orchestre jouait bien ce genre, d’où l’idée de ce programme."

Pour ce concert, la présence de la soliste Anne-Julie Caron s’imposait, car cette virtuose du marimba proposait d’interpréter des oeuvres françaises. "Je l’ai connue à l’époque où elle était au Conservatoire de Québec. Elle gagnait tous les concours au Canada. C’était l’étoile montante. Là, elle est rendue grande et fait carrière. Je suis content de l’inviter à Sherbrooke." Avec l’OSS, elle exécutera le Concerto pour marimba d’Emmanuel Séjourné, ainsi que l’Introduction et Rondo capriccioso de Camille Saint-Saëns. "C’est composé pour le violon, mais là, ce sera joué au marimba. C’est toujours flamboyant de voir quelqu’un qui tape sur des bouts de bois à une vitesse vertigineuse. C’est très impressionnant à voir. C’est comme le piano, mais là tu vois les coups et la fille qui se démène."

Maurice Ravel a son nom au programme avec Le Tombeau de Couperin. "Cette pièce met en vedette le premier hautbois de l’orchestre; il aura beaucoup de choses à jouer. C’est la sonorité Ravel, mais ce n’est pas autant impressionniste que La Mer de Debussy ou d’autres oeuvres de Ravel." Et le gros morceau de la soirée: la Symphonie nº 1 de Georges Bizet. "C’est un mélange des époques classique et romantique. C’est une symphonie écrite en do; il en a fait juste une. L’effectif de l’orchestre est réduit. C’est une formation classique."

Et pour la suite des choses, que peut-on souhaiter à l’OSS? Stéphane Laforest demeure évasif, car plusieurs projets sont sur la table. "Comme tout bon organisme, on se remet beaucoup en question." Et comme le bon vin français, notre orchestre continue de gagner en maturité.

À écouter si vous aimez /
L’OSS et son chef, les compositeurs français, les percussions