Pheek : Pheek ou double
En présentant Channeling, Pheek ne revient pas avec un disque, mais bien deux! Un projet ambitieux qui est tout sauf facile.
Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué? En cette ère de zapping et de surconsommation rapide, où on nous gave de musique de toutes les façons possibles, ils sont rares, les musiciens qui se lancent dans un projet aussi ambitieux que le diptyque Channeling du Montréalais Pheek.
Portrait en deux tableaux, Channeling se présente non pas en un tout mais de façon séparée. Il y a d’abord Worlds, paru le 26 octobre dernier, et Cycles qui sera en vente à partir du 30 novembre. Une oeuvre de musique électronique touffue et souvent déstabilisante, qui nous transporte d’un univers doucereux à un autre plus étrange avec des changements d’ambiance quelquefois surprenants. Une oeuvre qui aura demandé énormément de travail et que le bidouilleur a fait paraître sous son étiquette Archipel. "Ça m’a pris quatre ans pour arriver au bout de ce projet, mais là-dedans, il y a eu beaucoup d’ébauches et de réflexion", avoue candidement le vétéran de la scène électronique montréalaise. "Je voulais renouveler l’intérêt des gens pour la musique, et comme j’avais beaucoup de pièces, je ne voulais pas limiter ça à un seul album standard. Un peu comme Dumas a fait, je trouvais intéressant de concevoir un album en plusieurs tomes. Donc, le premier volet, je le voyais plus comme des cycles de vie, des expériences qu’on peut avoir, alors que le deuxième, c’est des petits mondes; les deux sont interconnectés, poursuit Pheek. Je voulais mettre les gens en appétit sans les surcharger d’informations, d’où l’idée d’insérer un mois de délai entre les parutions des deux efforts. De plus, je pense qu’il y a une certaine paresse chez les gens par rapport à la musique aujourd’hui et je voulais leur proposer un disque qui demande plus d’une écoute, un univers dans lequel on doit totalement se plonger, et y revenir pour vraiment le comprendre."
Tout en discutant, Pheek, de son vrai nom Jean-Patrice Rémillard, cite volontiers des artistes qui l’ont influencé dans sa démarche, des artistes qui n’ont souvent rien à voir avec la musique. "J’ai pas mal décroché de la musique électronique, car je trouve qu’il y a beaucoup de gens qui se répètent, qui copient. Je voulais créer quelque chose qui ferait son chemin en dehors des courants actuels. Je ne suis pas un innovateur, mais je voulais surtout montrer que la musique peut avoir de la personnalité en 2010", précise le musicien qui a tenté sa chance à Berlin avant de revenir s’établir à Montréal. "À un certain point, j’ai réalisé que le projet sur lequel je travaillais avait une certaine similitude avec l’écriture automatique. C’est là que j’ai compris où je m’en allais avec tout ça. Je suis sorti de mon mode de travail habituel, de ma routine, et suis entré en mode d’écriture automatique. Les choses se faisaient toutes seules. À partir de là, je me suis mis à m’intéresser à cette forme d’écriture, je suis même remonté jusqu’à des textes de Refus global, au dadaïsme, à Riopelle. J’ai vu des connexions entre la musique électronique et le mouvement spontané de création. C’est en se laissant aller que les choses flottent d’elles-mêmes. D’où le principe de faire une canalisation entre ce que je suis et ce que les gens sont. C’est comme ça que l’album a pris son envol."
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L’électro expérimentale, l’électro dub, l’art spontané