Small World Project : Chérie, j'ai réduit le projet
Musique

Small World Project : Chérie, j’ai réduit le projet

Il ratisse le patrimoine musical mondial et le triture à l’aide de minuscules instruments. C’est le Small World Project.

À vue de nez, le projet a tout l’air d’une bravade. Planquer ses instruments et les remplacer par leurs lilliputiens frérots. Troquer sa guitare pour un risible ukulélé ou un frivole charango. Échanger ses gros tambours virils pour des percussions de la taille d’un hochet de bébé. Ensuite, jouer de la musique écoutable, engageante même, si possible. Ce n’est pas exactement une sinécure que s’est imposée Small World Project.

Défi réussi, a-t-on le goût de crier, comme un animateur de talk-show, à l’écoute de Less Is More, deuxième album du trio à l’instrumentation minuscule et à l’inventivité majuscule. "Ça faisait 12 ans que je jouais avec MG3 (Montréal Guitare Trio), je voulais prendre un break. Je voulais vraiment faire quelque chose de différent, se souvient Sébastien Dufour, ukuléliste. J’ai téléphoné à Patrick [Graham, percussionniste, le Paganini du tambourin, selon le collègue Ralph Boncy] qui, paradoxalement, a beaucoup joué de taiko, des gros tambours japonais. Il s’est monté un arsenal de petits instruments. Frédéric Samson est venu compléter la bande avec sa contrebasse."

Résultat de l’amour de ses trois membres pour les musiques du monde (italienne, indienne, latine), pop (afrobeat, lounge, rock, reggae), jazz et actuelle, Small World Project touille une élégante macédoine qui n’a pas l’aspect trouble que cause souvent une telle boulimie. "On passe beaucoup de temps à arranger les pièces, précise le musicien. Il n’y a pas des milliers de façons de métisser du reggae dub et de la musique turque, faut trouver la bonne. Souvent, le plus difficile est de remplir les moyennes fréquences. Il y a la contrebasse et les petites cordes et percussions aux extrémités. Pour occuper le vide entre les deux, on doit trouver de nouvelles façons d’exploiter les instruments."

Tenté par la posture du mathématicien, on pourrait bêtement calculer que pour Dufour, virtuose de la guitare, manier des demi-portions est deux fois plus aisé. Il n’y a rien d’aussi simple, constate-t-on. "J’ai eu besoin d’une période d’adaptation. Sur le uk’, tout se trouve à être condensé. Il y a des instruments qui sont ardus pour des raisons particulières, comme le strumstick, qui a été inventé pour les frustrés de la guitare. Ce ne sont que trois cordes rapprochées et peu importe comment tu places tes doigts, c’est impossible de faire des fausses notes. Sauf que les trois cordes ne sont pas conçues pour être jouées séparément comme je le fais, elles doivent être "strummées", comme son nom le dit. Je me complique la tâche."

Loin d’être une simple curiosité – disons pour faire simple que Small World Project fait de la "vraie" musique -, le trio ne voit quand même pas de mal à rigoler en miniaturisant des monstres sacrés. "Je me suis amusé à repiquer Fire d’Hendrix avec mon ukulélé. Il y a un méga-contraste entre son jeu plein de fuzz et de wawa et le mien. C’est presque humoristique!"

À écouter si vous aimez /
MG3, le ukulélé, les musiques du monde