Valérie Milot : Mademoiselle M
Musique

Valérie Milot : Mademoiselle M

La carrière de la harpiste Valérie Milot est encore bien jeune mais, déjà, elle laisse entrevoir de magnifiques fruits.

Une lumière blafarde, un froid à faire craquer la peau des mains, une impression de déjà vu. Il y a quatre ans, presque jour pour jour, on rencontrait pour la première fois la harpiste Valérie Milot. À cette époque, la délicate jeune femme, fébrile, s’apprêtait à jouer ses premières partitions comme soliste professionnelle avec l’Orchestre symphonique de Trois-Rivières. Depuis, sa carrière n’est qu’une flamboyante ascension.

"Ça va bien pour une personne de mon âge et vu le nombre d’années que je fais ça professionnellement", consent la Trifluvienne, qui a entre autres été proclamée découverte de l’année 2009 aux Prix Opus et révélation de l’année 2009-2010 par Radio-Canada Musique. "J’ai collaboré avec plusieurs orchestres dont Les Violons du Roy. 2011, c’est spécial pour moi. J’ai souvent voyagé à l’extérieur pour des concours, mais je n’ai jamais donné de concerts à l’étranger. Et cette année, j’en ai deux en Europe: un en Suisse (mai) et un autre en France (octobre). Mon agence et moi avions hâte d’aller explorer d’autres pays, d’autres avenues!" Un désir freiné par de fausses croyances. "Quand on parle de sortir du pays, de voyager, les diffuseurs sont parfois frileux. Ils s’imaginent que c’est super compliqué. Ils n’ont donc pas envie de s’embarrasser avec ça. Ils sont vraiment intéressés et intrigués par le côté un peu mystérieux de l’instrument, mais ça suscite plus de craintes que quelqu’un qui va arriver avec son violon ou qui vient jouer du piano – à peu près toutes les salles de spectacle ont un piano", illustre la musicienne. Aussi, plusieurs "pensent que de la harpe toute seule, ça peut être terriblement ennuyeux. Il y a le préjugé selon lequel la harpe n’a pas beaucoup de portée, que c’est un instrument assez délicat. Souvent, ceux qui assistent à mes concerts et qui ne connaissent pas la harpe sont assez impressionnés du volume sonore qui peut s’en dégager. La harpe, c’est un instrument dont l’aspect plus rare a de bons côtés, mais aussi de mauvais que je ne soupçonnais pas. Il faut donc travailler fort et être patiente".

Heureusement, Valérie Milot profite d’un soutien énorme. "Je suis avec une maison de disques super dynamique, Analekta. Elle m’aide beaucoup en ce qui concerne la visibilité. J’ai de beaux projets, dont un album qui va sortir en mars. Et bien sûr, Radio-Canada m’a donné un bon coup de pouce. Ça a été une méga-vitrine pour moi d’être leur révélation de l’année en 2009-2010. J’en ressens encore les effets. Maintenant, à mes concerts, je rencontre beaucoup de gens qui ont entendu parler de moi. J’ai moins l’impression d’avoir toujours quelque chose à créer."

LA JEUNESSE

Pour son récital à l’Auditorium Raymonde-Blais, qui sera précédé d’un cocktail "mousseux, fraises et chocolats", la harpiste devrait justement se produire devant un public gagné d’avance. Comment pourrait-il en être autrement avec un programme pour harpe solo brodé autour du thème de l’amour (Franz Liszt, Carl Philipp Emanuel Bach)?

Mais l’élaboration de ce concert lui a-t-elle donné des maux de tête? Le répertoire pour harpe solo doit être assez limité, non? "Oui, si on le compare à celui du piano ou du violon. La harpe, c’est l’un des plus vieux instruments au monde. Mais ce qui fait que c’est un instrument classique, c’est-à-dire le mécanisme et ce qui permet d’avoir le même range – pardon pour l’anglicisme! – que le piano, ça date de 200 ans. Donc, le répertoire est quand même assez récent. C’est à l’époque romantique que la harpe a été officiellement intégrée à l’orchestre et qu’elle a commencé à être utilisée pour la musique de chambre et la musique solo. Malgré tout, je n’aurai jamais assez d’une vie pour jouer tout le répertoire pour harpe! C’est un instrument qui a beaucoup de répertoire actuel, qui est assez prisé par les compositeurs en ce moment." Même qu’il trouve de plus en plus sa place dans la musique populaire. Il suffit de penser à Björk. "À un moment dans ma vie, j’aimerais explorer d’autres genres de musique, que ce soit seule ou avec d’autres musiciens. Mais je n’ai pas encore de plans pour ça. Tous mes projets sont pas mal dans le répertoire et le milieu classiques. Mais je suis assez jeune et une carrière, ça peut être très long. Cette porte-là est vraiment ouverte dans ma tête. S’il y a une occasion qui se présente, c’est sûr que je vais la saisir!"