Revolver : Armé de tendresse
Musique

Revolver : Armé de tendresse

Chargé de musique baroque du 17e, de pop beatlesque et de folk à la Elliott Smith, Revolver est braqué sur vos oreilles.

Difficile de rester insensible face à la pop anglophone des Français de Revolver. Mélancoliques sans être lourdes, misant sur le violoncelle et la guitare acoustique tout en demeurant groovy, les chansons feutrées du trio de Paris coulent dans les oreilles. Renforcés d’harmonies vocales tantôt dignes du tandem Lennon-McCartney, les refrains du groupe s’apprivoisent illico.

Le dimanche matin, on écoute le premier album de Revolver, Music for a While, comme on écoute les vieux Belle & Sebastian, pour cette romance et ce sentiment de légèreté, d’apaisement qu’il dégage. "La musique que l’on fait vient des conditions dans lesquelles on la crée", se défend Ambroise Willaume lorsqu’on lui fait remarquer à quel point sa musique est loin de la violence des fusils. "Nous habitions dans un appartement de Paris où nous ne pouvions pas vraiment faire de bruit. Donc, avec Christophe (Musset, guitare / voix), nous avons créé des chansons à la guitare acoustique sous l’influence d’Elliott Smith. Il nous a donné le goût de composer, mais je crois que si nous avions eu une batterie et des amplis dans un garage, le résultat aurait été autrement", soutient le guitariste et chanteur de Revolver qui connaît un succès considérable en France: nominations aux Victoires de la musique, première partie d’Alain Souchon au Zénith…

L’énumération d’influences reviendra plus d’une fois au cours de l’entretien: Beatles (à qui le groupe doit son nom), Neil Young, Simon & Garfunkel, Leonard Cohen. Des références folk-pop suffisamment digérées pour que la formation évite le pastiche passéiste, et ce, malgré ses teintes baroques. "L’équilibre vient de la composition du groupe. Avant de se joindre à Christophe et moi, notre violoncelliste Jérémie (Arcache) n’avait jamais écouté de musique pop. On lui chantait Hey Jude et ça ne lui disait rien. Il ne connaissait que la musique classique. Nous avons dû le traîner à un concert de Radiohead pour parfaire son éducation. À l’inverse, Christophe a baigné dans le rock. Moi, je me situe à mi-chemin", explique Ambroise qui voit plusieurs points communs entre la pop moderne et les musiques anciennes. "Il y a les mélodies, les harmonies, certaines couleurs d’instrument, les voix… Au 17e, Purcell a écrit des pièces pour voix et luth. Tout est question de style et d’époque, mais il n’était pas si loin des pièces de Bob Dylan au fond. Parallèlement, énormément de chansons des Beach Boys me rappellent les chorals de Bach."

Ambroise peut bien faire référence aux harmonies des Beach Boys, lui et Jérémie se sont rencontrés à l’âge de six ans sur les bancs de la Maîtrise de Notre-Dame de Paris, un choeur associé à la grande cathédrale. Leur maîtrise vocale est implacable, incarnée et au service de la langue anglaise. Est-ce que le fait de voir des Français chanter en anglais soulève autant de débats en France qu’au Québec? Surtout que l’anglicisation de la musique est encore plus frappante dans l’Hexagone que dans la Belle Province? "Oui, on nous en parle souvent, mais pour moi, ce n’est pas une plus grande menace pour la langue française que tous ces anglicismes qui se sont installés dans notre vie de tous les jours, autant dans la rue que dans les textos et sur Facebook. Au départ, on cherchait à nous dissuader de chanter en anglais, pas pour préserver la langue, mais à cause de ces quotas francophones qui nuisent à la musique d’expression anglophone en France. On nous disait qu’on aurait plus de succès en français… Donc, ce n’est vraiment pas pour remporter plus de succès que nous chantons en anglais. Nos influences sont anglo-saxonnes, il est normal que notre premier réflexe soit d’écrire des paroles en anglais. Nous ne sommes pas antifrançais. Nous écoutons aussi Bashung et Gainsbourg."

Accompagné d’un batteur, Revolver présentera pour la première fois au Canada les pièces de son album Music for a While, en plus de celles de son nouveau maxi Parallel Lives.

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Les Beatles, Elliott Smith, Belle & Sebastian