Les Frères Goyette : L’âge de raison
Poètes des campagnes, Les Frères Goyette vieillissent en beauté. Rencontre avec trois de ses membres.
Un gala de lutte, des tours de magie… La folie des Frères Goyette allait autrefois dans toutes les directions. S’il conserve son caractère rural et sa fantaisie, le groupe champlainois qui entretient un étroit lien de parenté avec Gilles Vigneault et les Hillbilly Bears s’est raffiné depuis la sortie de Rencontre du troisième âge sur l’étiquette Grosse Boîte, l’automne dernier.
"Aujourd’hui, nos spectacles sont moins cabotins, soutient le guitariste Olivier Morin (alias Birmance Goyette). Avant, on avait des solos de sécheuse, de "canisses". Ça faisait un peu plus freak show. Maintenant, c’est plus rodé, moins éparpillé."
"C’est comme la suite des choses. Un moment donné, on vieillit un peu, enchaîne Simon Laganière (Mario Goyette), le leader de la formation. Minimiser les dégâts, l’album précédent, c’étaient des histoires inventées. Ce disque-là est un peu plus personnel. Les histoires que je raconte sont arrivées à Laurent [Laganière, Sylvain Goyette] et à moi dans la vraie vie – notre mère a entre autres été malade. Mais je les transpose à Mario. Dans le fond, Mario, c’est pas mal moi, mais en moins épais!"
Cela explique qu’une pièce comme En résidence, entre nous, brodée autour du quotidien d’un vieil homme dans un foyer pour personnes âgées, nous arrache une larme plutôt qu’un sourire. "Je trouvais que c’était un bon filon, les vieux, et qu’on n’en parlait pas beaucoup, explique le compositeur du groupe. La musique qu’on fait, c’est vraiment ce que j’aime. On n’essaye pas de faire des chansons ou un produit en fonction des personnages."
Les Frères Goyette existent depuis 13 ans. Simon Laganière s’occupe en quelque sorte de la direction artistique. Mais est-ce aussi lui qui tient la famille unie – seuls quelques membres ont quitté le navire – depuis tout ce temps? "Oui, et à bout de bras! lance-t-il en rigolant. Non, pas tant que ça. On est comme un vieux couple. Il y a eu des hauts et des bas. J’ai peut-être été le moteur, mais je n’ai jamais tiré le bras à personne. Je trouve que c’est un projet qu’il faut que tu fasses de bon coeur."
UN MONDE
Les six musiciens ont justement une nouvelle motivation pour mordre à pleines dents dans l’univers débridé des Goyette: une websérie réalisée par l’agence trifluvienne Egzakt, diffusée sur le site de Bande à part. Dans ce projet, Mario s’efface pour laisser la vedette au "patenteux" de la formation: Sylvain. "C’est drôle, au début, les Goyette le parrainaient parce qu’il était débile léger. Et maintenant, c’est lui qui "leade" les Goyette!" clame Simon en pensant aux différents épisodes de la première saison, qui aura inévitablement une suite.
"J’étais comme un genre de mascotte, se remémore Laurent quand on le questionne sur les débuts de son personnage. Sylvain, c’était l’ancien guitariste des Goyette qui avait eu un accident de porte patio. Les membres du groupe essayaient donc de le réintégrer sur la scène. La première fois, Sylvain était juste venu écouter la télé. Après le spectacle, des gens étaient d’ailleurs venus me voir pour m’encourager. Ils pensaient vraiment que j’étais déficient! Aussi, pour le show, il fallait que je danse. Et moi, le beau cave, je l’ai fait. C’est pourquoi, un moment donné, j’ai dit: "Je pourrais construire ou bricoler quelque chose pendant les représentations. Il me semble que ça serait plus cool que de danser!""
Désormais, les fantaisies de Sylvain sont devenues la marque de commerce des Goyette en spectacle. Que prévoit le personnage pour la représentation à Trois-Rivières? "Je vais faire ça un peu plus gros que d’habitude. Dans les petites salles, les petits bars, il faut se restreindre un peu. Là, on va avoir plus d’espace", répond celui qui a inventé un moteur à ski de fond lors de leur dernier concert.
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